Le Conseil d’État rappelle qu’une société membre d’une intégration fiscale n’est pas recevable, à défaut de mandat donné par la société tête de l’intégration fiscale, à demander auprès de l’administration fiscale la décharge de l’imposition litigieuse acquittée par la société mère intégrante. Il juge dès lors que les premiers juges n’étaient pas tenus d’inviter la filiale intégrée à régulariser le vice lié à l’absence de mandat donné par la tête intégrante.
Rappel
Groupe fiscal : qualité pour déposer une réclamation
Les sociétés membre d’un groupe fiscal sont tenues solidairement au paiement de l’IS ainsi que des éventuelles pénalités dont la société mère est redevable, dans la limite des sommes qui seraient dues par chacune des sociétés si elles étaient imposées séparément (CGI, art. 223 A dernier alinéa).
Toutefois, lorsque l’impôt a été acquitté par la société mère intégrante, les sociétés membres du groupe ne sont plus susceptibles de se voir réclamer son paiement en leur qualité de débiteur solidaire. Réciproquement, les sociétés membres ne sont pas recevables dans ce cas à demander à l’Administration la restitution du montant acquitté en l’absence de mandat d’agir en ce sens obtenu de la société mère (CE, 10 juin 2013, n°337137, Sté Fresenius Medical Care Groupe France ; CE, 13 décembre 2017, n°398726, Sté HSBC Bank PLC Paris Branch).
Régularisation des vices de forme affectant une réclamation
Selon la jurisprudence, il résulte des articles R. 197-3, R. 197-4 et R. 200-2 du LPF que, si une réclamation présentée par une personne qui n’a ni qualité ni mandat pour le faire est irrecevable, ce vice de forme peut, en l’absence de demande de régularisation adressée par l’Administration dans les conditions prévues à cet effet, être régularisé par le contribuable dans sa requête devant le tribunal administratif.
En synthèse :
- Le défaut de mandat est régularisable jusqu’à l’expiration du délai imparti au contribuable pour déposer sa requête devant le TA ;
- Passé ce délai, la réclamation et, par conséquent, la saisine du TA, ne peuvent plus être régularisées et sont irrecevables, quand bien même l’Administration n’aurait pas invité le contribuable à le faire (voir notamment en ce sens : CE, 7 décembre 2015, n°371406, Sté Last Minute Network Ltd et CE, 13 décembre 2017, n°398726, Sté HSBC Bank PLC Paris Branch précité).
L’histoire
À l’issue d’une vérification de comptabilité portant sur les exercices 2012 à 2014, les résultats fiscaux d’une société membre d’une intégration fiscale ont fait l’objet d’un redressement au titre de l’impôt sur les sociétés. Les cotisations supplémentaires d’IS mises à la charge de la société tête de l’intégration ont été réglées par cette dernière. Par la suite, la société membre en a demandé le remboursement à l’Administration dans le cadre d’une réclamation.
La décision
Dans la droite lignée de sa jurisprudence, le Conseil d’État relève que :
- à défaut de mandat de la société tête de groupe, la société membre de l’intégration fiscale n’était pas recevable à demander à l’administration fiscale, comme elle l’a fait, la décharge de l’imposition litigieuse acquittée par sa société mère intégrante ;
- la requête adressée au tribunal administratif a été présentée par la société membre de l’intégration fiscale « représentée par » la société tête de l’intégration fiscale, « elle-même représentée par son Président » et « assistée de Me [X]» ;
- cette demande n’a donc pas été présentée par la société membre de l’intégration pour le compte de la société mère intégrante.
Dès lors, il en conclut que les premiers juges n’étaient pas tenus d’inviter la société intégrée à régulariser le vice attaché à l’absence de mandant donné par la société mère intégrante, une telle irrégularité étant insusceptible d’être couverte après l’expiration du délai de recours.
Le pourvoi de la filiale intégrée est ainsi rejeté.