L’industrie automobile n’échappe pas au processus de digitalisation de notre économie et le droit de l’Union européenne en tient compte. C’est précisément pour cela que, pour la poursuite de l’objectif d’assurer une saine concurrence en matière de distribution, les nouveaux textes qui ont été adoptés pour déterminer le champ et le contenu des pratiques exemptées, c’est-à-dire autorisées en dépit de leur atteinte au droit de la concurrence, visent expressément les aspects digitaux.
Alors que la majorité des constructeurs automobiles possèdent déjà des sites vitrines qui permettent de choisir et de réserver un véhicule en ligne pour l’acheter ensuite auprès d’un point de vente physique, certains acteurs comme Aiways ou encore Stellantis ont fait le choix de proposer à leurs clients d’acheter leurs véhicules automobiles en ligne, directement sur leur site internet ou via des plateformes.
Enjeu majeur de l’évolution et de la dynamisation du secteur automobile, la vente en ligne se trouve également au cœur des évolutions récentes du droit de la concurrence.
Dans son nouveau règlement d’exemption par catégorie applicable aux accords verticaux (Règlement n°2022/720 du 10 mai 2022 remplaçant le Règlement 330/2010 du 20 avril 2010), la Commission européenne a expressément prévu le principe selon lequel les accords verticaux qui ont pour objet d’empêcher l’utilisation effective d’internet par des distributeurs sont une restriction caractérisée (article 4, (e) dudit Règlement). De tels accords sont donc susceptibles d’être sanctionnés en tant qu’ententes anticoncurrentielles par le droit de la concurrence. Ce principe avait été établi jusqu’alors par la jurisprudence et les lignes directrices de la Commission.
Avec les nouvelles lignes directrices adoptées avec le nouveau règlement 2022/720 (Lignes directrices sur les restrictions verticales n°2022/C 248/01 du 30 juin 2022 remplaçant les Lignes directrices sur les restrictions verticales n°2010/C 130/01 du 19 mai 2010), la Commission européenne a également affiné les conditions d’encadrement de la vente en ligne dans tout système de distribution.
Elle précise à ce titre que le fournisseur pourra imposer à ses distributeurs des conditions visant à garantir la qualité de leur site internet ou exiger de leur part qu’un nombre minimal de produits y soient présentés (Lignes directrices sur les restrictions verticales n°2022/C 248/01, point 208).
Le fournisseur aura en outre la possibilité de pratiquer un prix de gros différent selon que les produits seront vendus en ligne ou hors ligne alors que cette pratique était autrefois sanctionnée par le droit de la concurrence. La Commission précise cependant que cette pratique ne devra pas avoir pour objet d’empêcher l’utilisation effective d’Internet par le distributeur pour vendre les produits ou services sur un territoire ou à une clientèle spécifique (Lignes directrices sur les restrictions verticales n°2022/C 248/01, point 209).
Enfin, lorsqu’il aura fait le choix de mettre en place un réseau de distribution sélective, le fournisseur pourra désormais imposer à ses distributeurs agréés des critères de vente en ligne qui ne soient pas équivalents à ceux imposés pour les ventes dans des points de vente physiques. Le fournisseur pourra par exemple imposer à son distributeur en ligne de créer et d’exploiter un service après-vente d’assistance en ligne ou de couvrir les coûts liés au retour des produits achetés par les clients. Cette pratique de différenciation ne devra cependant en aucun cas aboutir à entraver le recours à la vente en ligne pour la vente des produits concernés (Lignes directrices sur les restrictions verticales n°2022/C 248/01, point 235).
Ces précisions relatives à la vente en ligne étaient nécessaires pour permettre aux acteurs du secteur automobile de prendre le virage de la transition digitale dans le respect du droit européen de la concurrence.