Loi de finances 2024 : analyse des mesures les plus marquantes

La loi de finances pour 2024 a été publiée au JO du 30 décembre 2023, après avoir été validée, pour l’essentiel, par le Conseil constitutionnel.

Nous remercions vivement Vanessa Irigoyen, Delphine Nicault, Nicolas Kazandjian, Bérenger Richard et Robin Maubert (équipe TVA de Deloitte Société d’Avocats) pour leur analyse des mesures TVA.

 

Sommaire

Fiscalité des entreprises

Prix de transfert

Fiscalité des personnes

Contentieux et contrôle fiscal

TVA

Autres mesures

 

Fiscalité des entreprises

Transposition de la directive Pilier 2 (art. 33)

La LF 2024 prévoit la transposition de la directive (UE) 2022/2523 du 14 décembre 2022 visant à assurer un niveau minimum d’imposition mondial pour les groupes d’entreprises multinationales et les groupes nationaux de grande envergure.

Vous trouverez ci-après un bref aperçu des dispositions visant à intégrer Pilier 2 dans notre droit interne. 

Dispositions générales

Le texte français semble être une transposition fidèle du texte de la directive Pilier 2 agrémenté des commentaires additionnels publiés par l’OCDE depuis 2022. 

Il prévoit en effet d’instaurer une imposition minimale fixée à 15 % pour les groupes d’entreprises multinationales ayant un CA consolidé supérieur ou égal à 750 m€. Le texte est également applicable aux groupes strictement implantés sur le territoire français atteignant un tel seuil mais avec une tolérance pour les 5 premiers exercices. 

Cette imposition minimale prendra la forme d’un impôt complémentaire déterminé, selon les cas, selon la règle d’inclusion du revenu (IIR « Income Inclusion Rule ») ou selon la règle relative aux bénéfices insuffisamment imposés (UTPR « Undertaxed Payment Rule »). 

La France retient par ailleurs l’option de mettre en place un « impôt national complémentaire qualifié » (QDMTT « qualified domestic minimum top-up tax »). 

Cette QDMTT sera assise sur le bénéfice excédentaire réalisé par le groupe, calculé à partir du résultat net comptable déterminé selon les principes comptables français prévus par l’ANC ou selon les normes comptables internationales en lieu et place de la norme de comptabilité financière utilisée pour l’établissement des états financiers consolidés de l’entité mère ultime. 

La IIR et la QDMTT s’appliqueront à compter du 1er janvier 2024 et la UTPR à compter du 1er janvier 2025. 

Les règles de simplification temporaires (SHR) prévues par l’OCDE au titre des 3 premiers exercices sur la base d’agrégats issus de la déclaration CbCR sont également reprises (test de minimis, test TEI et test de substance). 

Obligations déclaratives, pénalités et délai de reprise de l’Administration  

Les entités constitutives appartenant à des groupes entrant dans le champ d’application de Pilier 2 seront tenues d’indiquer à l’administration fiscale, dans leur déclaration de résultat, leur appartenance à un tel groupe, l’identité de l’entité mère ultime du groupe et, le cas échéant, de l’entité qui dépose la déclaration d’information (GIR), ainsi que l’Etat ou le territoire dans lequel les entités sont situées. 

La déclaration d’information devra être déposée sous forme dématérialisée dans les 15 mois suivant la clôture de l’exercice (délai allongé à 18 mois dans l’hypothèse d’une 1re entrée dans le champ d’application de l’impôt complémentaire). Un relevé de liquidation de l’impôt complémentaire dû devra être déposé dans les mêmes délais. 

Le défaut de souscription de la déclaration d’information ou du relevé de liquidation ou le dépôt tardif de ces documents, entraîneront l’application d’une pénalité de 100 k€. Tout autre manquement aux obligations déclaratives précitées pourra entraîner l’application d’une pénalité ne pouvant pas excéder 50 k€ par déclaration. On notera que la LF 2024 plafonne la somme des amendes que les entités constitutives, situées en France, d’un même groupe, peuvent se voir appliquer au titre d’un même exercice, à 1 m€. 

La loi précise que, pour l’impôt complémentaire, le droit de reprise de l’Administration pourra s’exercer jusqu’à la fin de la 5e année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due. Ainsi, l’Administration pourra remettre en cause l’impôt complémentaire dû au titre de l’exercice clos le 31.12.2024 jusqu’au 31.12.2029.

Prise en compte des recommandations publiées par l’OCDE 

La LF 2024 habilite, par ailleurs, le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance (dans un délai de 12 mois à compter de la publication de la LF 2024) toute mesure législative visant à préciser et compléter toute disposition relative à la déclaration, au recouvrement, au contrôle et aux sanctions des impôts complémentaires dus au titre de la IIR, de la UTPR, ou de la QDMTT.  

Selon l’exposé des motifs de l’article, cette habilitation a pour but de laisser à la France la possibilité d’intégrer dans son droit national des recommandations ultérieures émanant de l’OCDE (groupes de travail toujours en cours à l’heure actuelle). 

On notera que le législateur tient d’ores et déjà compte du contenu de certaines instructions administratives publiées par l’OCDE. Par exemple, en alignant le régime des entités d’investissement d’assurance sur celui applicable aux entités d’investissement en ce qu’elles ne peuvent pas être regardées comme une entité mère intermédiaire ou une entité mère partiellement détenue (alignement prévu par les instructions administratives publiées par l’OCDE le 2 février 2023, voir § 3.2). En revanche, bien évidemment, le contenu des instructions administratives publiées par l’OCDE le 18 décembre 2023 n’est pas pris en compte.

CVAE – Etalement de la suppression totale initialement prévue en 2024 (art. 79)

Pour mémoire, la LF 2023 avait réduit de moitié, pour l’année 2023, le taux de la CVAE, en prévoyant expressément sa suppression totale à compter du 1er janvier 2024.

Finalement, la LF 2024 prévoit d’échelonner sur 4 ans la suppression de la CVAE pour une suppression totale en 2027.

Suppression progressive de la CVAE sur 4 ans

Pour mémoire, le taux d’imposition de la CVAE, pour l’année 2023, est fixé à un taux maximal de 0,375 % pour l’ensemble des redevables.

Toutefois, les entreprises dont le chiffre d’affaires (CA) hors taxe n’excède pas 50 m€ bénéficient d’un dégrèvement dont le montant varie en fonction du CA.

En pratique, ce mécanisme aboutit à une exonération de CVAE lorsque le CA est inférieur à 500 k€ et à une taxation de la valeur ajoutée à un taux variable selon le CA lorsque celui-ci est compris entre 500 k€ et 50 m€.

Ces taux effectifs seront progressivement diminués pour 2024, 2025 et 2026, avec des taux maximum de CVAE de, respectivement, 0,28 %, 0,19 % et 0,09 %, avant suppression totale en 2027.

 

 

Par ailleurs, la CVAE calculée d’après le taux effectif d’imposition est dégrevée d’un montant complémentaire de 250 € lorsque le CA hors taxe de l’entreprise est inférieur à 2 m€. Ce montant complémentaire de 250 € sera abaissé à 188 € en 2024, 125 € en 2025 et 63 € en 2026.

La CVAE ne sera, par ailleurs, désormais plus due, lorsque son montant annuel n’excède pas 63 € (suppression donc, dès le 1er janvier 2024, de la cotisation minimum sur la valeur ajoutée).

Afin de garantir les mêmes ressources pour les CCI, le taux de la taxe pour frais de CCI (CGI, art. 1600, III, 1, al. 2) sera, lui, porté de 6,92 % à 9,23 %, pour les impositions établies au titre de 2024, à 13,84 % pour les impositions établies au titre de 2025 et à 27,68 % pour les impositions établies au titre de 2026.

Ajustement progressif du plafonnement de la CET

Pour mémoire, la cotisation économique territoriale (CET) est composée d’une part, de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et d’autre part, de la cotisation foncière des entreprises (CFE).

Le montant de la CET est actuellement plafonné à 1,625 % de la valeur ajoutée produite par l’entreprise (CGI, art. 1647 B sexies).

La suppression progressive de la CVAE entraîne un ajustement corrélatif du plafonnement de la CET.

Ainsi, pour les impositions dues au titre de 2024, le taux du plafonnement sera ramené à 1,531 %, puis à 1,438 % pour 2025, et à 1,344 % pour 2026.

A compter de 2027, il s’élèvera à 1,25 % et ne concernera plus, en tout état de cause, que la CFE.

Intégration fiscale et aménagement du régime des distributions (art. 52)

Rappel

Pour mémoire, les produits de participation qui ouvrent droit au régime mère-filiales sont exclus du résultat imposable de la société bénéficiaire desdits produits, à l’exception d’une QPFC de 5 % du montant total des produits des participations (CGI, art. 216 et 145).

Pour les exercices ouverts avant le 1er janvier 2016, cette QPFC était neutralisée au titre des dividendes versés entre sociétés intégrées, avant que la CJUE ne juge que le fait que les produits de participation reçus de filiales établies dans d’autres États membres ne puissent pas bénéficier de ce mécanisme de neutralisation était contraire à la liberté d’établissement (CJUE, 2 septembre 2015, aff. C-386/14, Groupe Stéria SCA).

Pour les exercices ouverts depuis le 1er janvier 2016, la QPFC est ramenée à 1 % pour les produits de participation reçus par une société membre d’une intégration fiscale :

  • Et versés par une société membre du même groupe d’intégration fiscale,
  • Ou, versés par une société établie dans un autre État de l’UE ou de l’EEE ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales qui, si elle était établie en France, remplirait les conditions pour être membre de ce groupe, en application des articles 223 A ou 223 A bis du CGI, autres que celle d’être soumise à l’IS en France (LFR 2015 tirant les conséquences de la décision Stéria précitée).

Pour les exercices ouverts depuis le 1er janvier 2019, la QPFC s’élève également à 1 % pour les produits de participation reçus par une société non membre d’une intégration fiscale et versés par une société établie dans un autre État de l’UE ou de l’EEE ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales qui, si elle était établie en France, remplirait les conditions pour être membre du même groupe d’intégration fiscale, en application des articles 223 A ou 223 A bis du CGI, autres que celle d’être soumise à l’IS en France à condition que la société mère, percevant les dividendes, ne dispose pas, en France, de filiales éligibles au régime de l’intégration fiscale (LF 2019).

La loi prévoit expressément que ce taux de 1 % ne s’applique pas si la non-appartenance de la société française à un groupe d’intégration fiscale est uniquement due à l’absence des options et des accords à formuler en application du I et du 1er alinéa du III de l’article 223 A du CGI et du I de l’article 223 A bis du même Code (CGI, art. 216, I, 3°).

Dans le cadre des affaires Manitou et SA Bricolage Investissement, la CJUE a jugé qu’était contraire à la liberté d’établissement la législation française en vigueur avant 2016 en ce qu’elle refusait le bénéfice de l’ancien mécanisme de neutralisation de la QPFC à une société mère, disposant en France de sociétés intégrables mais non intégrées par choix, à raison des dividendes qui lui sont distribués par ses filiales établies dans d’autres Etats membres satisfaisant aux critères d’éligibilité autres que la résidence (11 mai 2023, aff. C-407/22 et C-408/22).

Le Conseil d’Etat en avait ensuite tiré les conséquences dans deux décisions du 18 juillet 2023 (n°458579 et 454107).

Si ces décisions concernaient le régime en vigueur avant 2016, leur transposition au régime actuel faisait toutefois peu de doute.

LF 2024

Extension du bénéfice de la QPFC de 1 % aux dividendes reçus par une société non-membre d’une intégration fiscale par choix d’une filiale européenne

Le législateur vient, à son tour, tirer les conséquences des décisions du juge européen.

On notera que, dans l’exposé des motifs, il est expressément indiqué que ces décisions ont « pour conséquence de rendre contraire au droit de l’Union européenne la condition d’avoir effectivement formé un groupe intégré en France – pour les sociétés qui sont en mesure de le faire – pour bénéficier du régime de dividendes perçus de filiales européennes ».

Il prévoit donc que la QPFC au taux de 1 % pourra s’appliquer aux dividendes reçus par toute société française non intégrée (que cela résulte ou non d’un choix de sa part) de sa filiale européenne, pourvu qu’elle remplisse avec sa filiale européenne, depuis plus d’un exercice, les conditions pour appartenir à un groupe fiscalement intégré si cette société avait été établie en France (assujettissement à un impôt équivalent à l’IS français, conditions de détention satisfaites, coïncidence des dates d’ouverture et de clôture des exercices).

On notera que la mesure tire très strictement les conséquences des décisions Manitou et SA Bricolage Investissement, sans étendre le bénéfice de la QPFC de 1 % aux dividendes reçus par une société française non intégrée d’une filiale française qui remplirait elle-même les conditions pour former avec sa mère un groupe intégré.

Aussi, la question d’une discrimination à rebours (traitement plus favorable des dividendes versés par une société européenne que des dividendes versés par une société française) nous semble devoir se poser.

Rétablissement de la condition d’appartenance au groupe de la société distributrice depuis plus d’un exercice pour bénéficier de la QPFC au taux de 1 %

Le Gouvernement s’est saisi de l’occasion pour rétablir la condition d’appartenance au groupe de la société distributrice depuis plus d’un exercice pour bénéficier de la QPFC au taux de 1 %.

Désormais, pour bénéficier de la QPFC au taux de 1 %, il faudra que la société distributrice appartienne au groupe depuis plus d’un exercice (cas d’une société française intégrée) ou remplisse depuis plus d’un exercice les conditions d’appartenance au groupe (cas d’une société européenne).

Rappelons que cette condition avait été supprimée par la LFR 2015. En revanche, elle s’applique toujours dans le cadre du mécanisme de neutralisation à 99 % des distributions intragroupes n’ouvrant pas droit au régime mère-fille.

Extension du mécanisme de déduction de 99 % des produits de participation n’ouvrant pas droit au régime mère-fille reçus par une société non-membre d’une intégration fiscale (idem QPFC de 1 %)

Ce mécanisme est également amendé. Il s’appliquera ainsi aux dividendes n’ouvrant pas droit au régime mère-fille reçus :

  • Par toute société française non intégrée, que cela résulte ou non d’un choix, à raison d’une participation dans une filiale soumise à un impôt équivalent à l’IS dans un autre Etat de l’UE/EEE ;
  • Dès lors que ces sociétés remplissent, depuis plus d’un exercice, les conditions pour constituer un groupe (à l’exception de l’établissement de la société distributrice en France).

L’ensemble de ces mesures sont applicables au titre des exercices clos à compter du 31 décembre 2023 (rétrospectivité de la loi fiscale).

Conditions de détention au sein de l’intégration fiscale et modalités de non-prise en compte des titres détenus par les salariés (art. 62)

Rappel

Pour mémoire, pour se constituer tête d’un groupe intégré, une société ne doit pas elle-même être détenue à 95 % au moins par une autre personne morale soumise à l’IS, et elle doit détenir à 95 %, directement ou indirectement, les sociétés membres du groupe.

En principe, les titres détenus par les salariés sont retenus pour apprécier ces niveaux de détention.

Il est toutefois fait abstraction des titres attribués aux salariés ou acquis par ces derniers dans le cadre de certaines procédures spécifiques (options de souscription ou d’achat d’actions, attribution gratuite d’actions ou augmentation de capital réservée aux adhérents d’un PEE), dans la limite de 10 % du capital (CGI, art. 223 A, I, al. 6).

L’exclusion des titres attribués aux salariés dans le cadre de ces procédures spécifiques pour le calcul du pourcentage de détention n’a plus lieu d’être à compter du jour de la cession de ces titres ou de la cessation de fonctions des salariés concernés.

LF 2024

L’exclusion continuera de s’appliquer dans le cas où le salarié cesse ses fonctions dans la société qui l’employait lors de l’émission ou de l’attribution des titres, mais pour rejoindre une autre société du même groupe économique incluse dans le plan d’émission ou d’attribution.

Elle prendra fin en cas de cession des titres par le salarié, ou de cessation de ses fonctions dans le groupe de sociétés incluses dans le périmètre du plan, ou de sortie de la société concernée du périmètre du plan.

La mesure s’appliquera au titre des exercices clos à compter du 31 décembre 2023.

Crédit d’impôt au titre des investissements en faveur de l’industrie verte – « C3IV » (art. 35)

La LF 2024 prévoit l’instauration du nouveau crédit d’impôt au titre des investissements en faveur de l’industrie verte tel qu’annoncé dans le cadre du projet de loi « Industrie verte ».

Ce crédit d’impôt, « C3IV », sera accordé, sur agrément préalable, au titre de certains investissements spécifiques.

Agrément préalable

Pour pouvoir bénéficier du C3IV, les entreprises éligibles devront déposer une demande d’agrément préalable à toute acquisition auprès du Ministre chargé du budget.

Il leur faudra, dans ce cadre, présenter un plan d’investissement justifiant du caractère éligible de l’activité et des investissements envisagés, ainsi que du caractère économiquement viable du plan d’investissement.

Si le plan d’investissement comporte des constructions immobilières, la demande d’agrément devrait être déposée avant la date d’ouverture du chantier.

La décision de délivrance ou de refus de l’agrément sera rendue – après avis conforme de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) – dans un délai de 3 mois.

L’agrément fixera le montant des dépenses éligibles, ainsi que le taux de crédit d’impôt applicable.

Entreprises concernées

Sont concernées les entreprises industrielles et commerciales imposées d’après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 octies A, 44 duodecies, 44 terdecies à 44 septdecies du CGI qui satisfont aux conditions cumulatives suivantes :

  • Ne pas être une entreprise en difficulté au sens de l’article 2 du règlement (UE) n°651/2014 
  • S’engager à respecter ses obligations fiscales et sociales et l’obligation de dépôt de ses comptes annuels au titre de chacun des exercices au titre duquel le C3IV sera imputé 
  • Exploiter les investissements éligibles au C3IV dans le cadre d’une activité ayant obtenu les autorisations requises par la législation environnementale, et se conformer à cette législation 
  • S’engager à exploiter, en France, les investissements éligibles au C3IV pendant 5 ans au moins à compter de la date de leur mise en service (durée réduite à 3 ans pour les PME) 
  • S’engager à ne pas transférer, dans les 5 exercices, leur activité hors du territoire national 
  • Ne pas avoir transféré vers le territoire national, au cours des 2 exercices précédant celui du dépôt de la demande d’agrément, d’activités identiques ou similaires à celles éligibles au C3IV, en provenance d’un Etat membre de l’UE ou d’un Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen.

Activités éligibles

Sont visées les activités contribuant à la production de batteries, de panneaux solaires, d’éoliennes ou de pompes à chaleur.

Le texte délimite de façon précise pour chacun de ces domaines, les activités éligibles (II, A de l’article 35 de la LF). Ainsi, par exemple, pour la production d’éoliennes, est visée la fabrication de mats, de pales, de nacelles, de fondations posées et flottantes, de sous-stations électriques. Il en irait de même pour la fabrication de composants essentiels conçus et utilisés principalement comme intrants directs dans la production de ces équipements.

Un arrêté conjoint des ministres chargés de l’économie et de l’industrie déterminera la liste des équipements, sous-composants et matières premières utilisés dans le cadre de ces activités.

Investissements éligibles

Seront retenues les dépenses (autres que de remplacement) engagées, entrant dans la détermination du résultat imposable, en vue de la production ou de l’acquisition des éléments suivants :

  • Eléments corporels: Bâtiments, installations, équipements, machines et terrains d’assise nécessaires au fonctionnement de ces derniers équipements, à la condition de ne pas avoir été acquis auprès d’une entreprise liée au sens de l’article 39-12 du CGI ;
  • Eléments incorporels : Droits de brevet, licences, savoir-faire ou autres droits de propriété intellectuelle, sous réserve du respect d’un certain nombre de conditions ;
  • Les autorisations d’occupation temporaire du domaine public constitutives d’un droit réel.

L’assiette du crédit d’impôt est constituée du prix de revient majoré des taxes et frais de toute nature, à l’exception des frais directement engagés pour la mise en état d’utilisation du bien et minoré des aides publiques reçues à raison de ces dépenses.

Taux du crédit d’impôt et plafonnement

Le taux du C3IV sera mentionné dans l’agrément préalable.

Le taux de droit commun est de 20 %, mais il pourra être porté à :

  • 25 % pour les investissements réalisés dans les zones définies à l’Annexe 1 du décret n°2022-968 du 30 juin 2022, relatif aux zones d’aide à finalité régionale et aux zones d’aide à l’investissement des PME pour la période 2022-2027 (dans sa rédaction en vigueur au 1er septembre 2023) ;
  • 40 % pour les investissements dans les zones définies à l’Annexe 2 du décret susmentionné.

Ces taux seront de surcroît majorés de :

  • 10 % pour les investissements réalisés par les Moyennes entreprises au sens de la règlementation européenne (moins de 250 salariés, CA annuel n’excédant pas 50 m€ ou total du bilan annuel n’excédant pas 43 m€) ;
  • 20 % pour les investissements réalisés par les Petites entreprises au sens de la réglementation européenne (moins de 50 salariés, CA annuel ou total du bilan annuel n’excédant pas 10 m€).

Le montant total du C3IV est plafonné à 150 m€ par entreprise (200 m€ pour les investissements réalisés dans les zones définies à l’Annexe 1 du décret n°2022-968 du 30 juin 2022, relatif aux zones d’aide à finalité régionale et aux zones d’aide à l’investissement des PME pour la période 2022-2027 et 350 m€ pour les investissements réalisés dans les zones définies à l’Annexe 2 du décret susmentionné). Ce plafond s’appréciera en totalisant l’ensemble des aides d’Etat obtenues par des entreprises qui ne sont pas considérées comme autonomes.

Ainsi, de façon synthétique le montant du C3IV sera le suivant :

 

 

Il est précisé, s’agissant du cumul du C3IV avec d’autres aides d’Etat reçues au titre des dépenses éligibles, que :

  • le montant total de l’aide ne peut excéder le taux maximum de soutien prévu par ce texte ;
  • le montant total de l’aide ne peut excéder 100 % des coûts admissibles.

Modalités d’imputation du C3IV

Le crédit d’impôt s’appliquera par fraction au rythme de l’engagement des investissements éligibles en appliquant à ces dépenses le taux de crédit d’impôt mentionné dans la décision d’agrément.

Le montant du C3IV sera imputé sur l’IR/IS dû par le contribuable au titre de l’année/l’exercice au cours duquel ces dépenses sont exposées.

Si le montant de la fraction du crédit d’impôt excède l’impôt dû au titre de l’année ou de l’exercice, l’excédent sera restitué. Aucun délai n’est spécifié par le texte à ce stade.

Entrée en vigueur

La mesure entrera en vigueur à une date fixée par décret, postérieure à la réception par le Gouvernement de la réponse de la Commission européenne permettant de la considérer comme conforme au droit de l’UE en matière d’aides d’Etat (nb. la Commission européenne a émis un avis favorable le 8 janvier 2023). A noter que cette entrée en vigueur devra alors intervenir au plus tard 3 mois à compter de la réception de la réponse de la Commission européenne.

Toutefois, les entreprises peuvent d’ores et déjà procéder au dépôt de demandes d’agrément (dès la date de présentation de la LF 2024 en Conseil des ministres – soit le 27 septembre 2023). 

Le C3IV bénéficiera au titre des projets agréés jusqu’au 31 décembre 2025.

Taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance (art. 100)

Afin de financer des investissements massifs de l’Etat dans les infrastructures notamment ferroviaires, la LF prévoit la création, à compter du 1er janvier 2024, d’une taxe d’exploitation des infrastructures de transport de longue distance.

En cohérence, la taxe sur les recettes de l’exploitation du réseau autoroutier concédé serait supprimée (prévue aux actuels articles L.421-181 à L. 421-185 du Code des impositions sur les biens et les services).

Champ d’application

La nouvelle taxe, codifiée aux articles L. 425-1 à L. 425-20 du Code des impositions sur les biens et les services, concerne les entreprises exploitant des infrastructures de transport de longue distance, lesquelles s’entendent des infrastructures « permettant le déplacement de personnes ou de marchandises sur une longue distance au moyen d’engins de transport routier, ferroviaire ou guidé, d’aéronefs ou d’engins flottants ».

Selon l’exposé des motifs, cette taxe viserait essentiellement les grandes concessions autoroutières et les grands aérodromes. Les transports urbains ne seront pas concernés.

S’agissant du champ d’application territorial, les exploitations concernées sont celles rattachées à la France métropolitaine, la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, la Réunion et Mayotte, ainsi que, dans une certaine mesure, aux territoires de Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.

Conditions d’application

La taxe est soumise à une double condition de dépassement d’un seuil de CA et d’un seuil de rentabilité.

De façon plus précise :

  • Les revenus de l’exploitation encaissés au cours de l’année civile devront être supérieurs à 120 m€.
    Les revenus doivent s’entendre de l’ensemble des contreparties, hors TVA, obtenues ou à obtenir par l’exploitant au titre des opérations économiques réalisées, y compris ceux tirés de la location de l’assise foncière.
    Les contreparties relevant d’une activité annexe/distincte de l’exploitation de l’infrastructure de transport de longue distance et celles obtenues par la vente d’électricité produite grâce à l’infrastructure à des personnes autres que les usagers des infrastructures considérées ne seraient pas à retenir.

ET

  • Le niveau moyen de rentabilité de l’exploitation devra être supérieur à 10 %.
    Le niveau de rentabilité est égal au rapport du résultat net sur le chiffre d’affaires au titre d’un exercice comptable donné. Dans ce cadre, la taxe elle-même ne sera pas considérée comme une charge diminuant le résultat net.
    Le niveau moyen de rentabilité sera déterminé en retenant la moyenne des ratios des 7 derniers exercices comptables, en excluant les exercices les plus extrêmes (les 2 exercices des ratios les plus élevés ainsi que les 2 exercices des ratios les plus faibles).
    Aussi, pour apprécier, au titre de l’année 2024, le niveau moyen de rentabilité d’un exploitant, il faudra effectuer la moyenne des ratios déterminés au titre des exercices 2017 à 2023.

    Exemple à titre d’illustration :

 

 

Dans ce cadre, pour déterminer le taux moyen de rentabilité, les taux des années 2017 et 2020 sont exclus (ratios les plus faibles), ainsi que les ratios des années 2021 et 2022 (ratios les plus élevés).

Assiette, taux et liquidation

Une fois les 2 seuils dépassés, la fraction des revenus d’exploitation excédant 120 m€ sera soumise à une taxe dont le taux serait fixé à 4,6 %.

Ainsi, un exploitant d’infrastructure dans le champ de la nouvelle taxe, ayant réalisé un chiffre d’affaires de 230 m€ au titre de l’exercice 2024 et ayant atteint un niveau moyen de rentabilité supérieur à 10 % sur la base des agrégats 2017/2023 sera redevable d’une taxe de 5,06 m€ [110 m€ (230 m€ – 120 m€) x 4,6%].

La taxe ne sera pas déductible de l’IS.

Elle a pour fait générateur l’achèvement de l’année civile et sera acquittée par acomptes.

Elle s’appliquera pour la 1re fois à compter du 1er janvier 2024.

DAC 6 et secret professionnel : Limitation de l’obligation de notification pesant sur les intermédiaires (art. 120)

Pour mémoire, le 25 juin 2021, le Conseil d’Etat, saisi d’un REP contre les commentaires administratifs relatifs à la transposition, en droit français, des obligations pesant sur les intermédiaires fiscaux dans le cadre de la Directive DAC 6, a adressé à la CJUE 2 questions préjudicielles tenant à une possible incompatibilité des obligations déclaratives mises à la charge des avocats au regard des principes de droit à un procès équitable et de respect de la correspondance et de la vie privée (CE, 25 juin 2021, n°448486).

Il a, en cela, emboîté le pas de la Cour constitutionnelle belge, qui avait, quelques mois auparavant (en décembre 2020), saisi la CJUE de questions préjudicielles similaires.

La CJUE a répondu à la demande de la Cour constitutionnelle belge le 8 décembre 2022, en jugeant l’article 8 bis ter § 5 de la Directive DAC 6, imposant à un avocat non délié de son secret professionnel par son client et donc dispensé de l’obligation déclarative, de notifier sans retard à tout autre intermédiaire les obligations déclaratives qui lui incombent, non conforme à l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE, qui garantit le droit au respect des communications entre les avocats et leurs clients (décision C-694/20).

Le Conseil d’Etat a considéré que le prononcé de cette décision mettait fin aux débats, et a indiqué à la CJUE qu’il retirait, en conséquence, sa demande de décision préjudicielle.

Dans une décision datée du 14 avril 2023, il a, à son tour, jugé que l’obligation pesant sur l’avocat non délié de son secret professionnel par son client, de notifier sans retard à tout autre intermédiaire les obligations déclaratives qui lui incombent, était contraire à l’article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE (CE, 14 avril 2023, n°448486). Il a, par suite, annulé les paragraphes 180 et 200 du BOFiP, relatifs à cette obligation (BOI-CF-CPF-30-40-10-20, 21 juillet 2021).

Afin de tirer les conséquences de ces récentes décisions, la LF 2024 limite l’obligation pesant sur l’intermédiaire non délié de son secret professionnel, de notifier les autres intermédiaires, aux seuls intermédiaires qui sont ses clients (CGI, art. 1649 AE, I, 4°, al. 2).

En l’absence d’entrée en vigueur spécifique, la mesure devrait s’appliquer à compter du 1er janvier 2024.

Taxation au taux réduit des PV de cessions d’immeubles de bureaux destinés à être transformés en immeubles d’habitation (art. 51)

Rappel

L’article 210 F du CGI prévoit la taxation au taux réduit de 19 % des plus-values nettes réalisées par les personnes morales soumises à l’IS dans les conditions de droit commun, à l’occasion de la cession d’immeubles de bureaux et de locaux commerciaux ou industriels destinés à être transformés en immeubles d’habitation dans un délai en principe fixé à 4 ans. Sont également concernées les plus-values résultant de la cession de terrains à bâtir en vue de la construction de logements.

La LF 2018 a recentré le dispositif sur les cessions de biens situés dans des zones géographiques se caractérisant par un déséquilibre particulièrement important entre l’offre et la demande de logements.

Ce dispositif, qui a vocation à être temporaire, a été prorogé à plusieurs reprises. Il devait venir à expiration au titre des cessions réalisées au 31 décembre 2023.

LF 2024

Le dispositif prévu à l’article 210 F du CGI est de nouveau prorogé, pour s’appliquer :

  • aux cessions à titre onéreux réalisées jusqu’au 31 décembre 2026
  • et aux cessions à titre onéreux réalisées après le 31 décembre 2026 si une promesse unilatérale ou synallagmatique de vente a été conclue au plus tard à cette date et que la cession est réalisée au plus tard 2 ans après la date de la promesse.

Par ailleurs, la LF 2024 apporte quelques aménagements supplémentaires au dispositif.

Certaines opérations « mixtes » seront désormais éligibles, à la condition que le cessionnaire s’engage à réaliser des locaux dont la surface habitable représente au moins 75 % de la surface totale mentionnée sur le permis de construire du programme immobilier ou sur la déclaration préalable de travaux.

Dans cette hypothèse, le taux d’imposition réduit de 19 % s’appliquera à la part de la plus-value égale au produit de cette dernière par le rapport entre la surface habitable et la surface totale des locaux ainsi transformés.

Par ailleurs, le délai de 4 ans pour procéder aux travaux de transformation des locaux sera porté à 6 ans pour les opérations d’envergure, c’est-à-dire celles créant une emprise au sol supérieure ou égale à 20 000 m2.

Ces aménagements sont applicables aux cessions intervenues à compter du 1er janvier 2024.

Aménagement et renforcement du statut de JEI

Rappel

Pour mémoire, le statut de JEI est accordé aux PME (au sens de la législation européenne), créées depuis moins de 11 ans, ou de depuis moins de 8 ans pour celles créées depuis le 1er janvier 2023.

Le dispositif s’applique aux entreprises créées jusqu’au 31 décembre 2025.

Les PME doivent, en outre, satisfaire à certaines conditions de détention. Il leur faut, par ailleurs, engager au cours de chaque exercice des dépenses de R&D représentant au moins 15 % de leurs charges fiscalement déductibles.

Ce statut leur donne droit à un certain nombre d’avantages. Il leur permet ainsi de bénéficier d’une période d’exonération totale des bénéfices, suivie d’une période d’abattement de 50 %, de douze mois chacune (CGI, art. 44 sexies A). Elles peuvent, de surcroît, bénéficier d’une exonération facultative d’impôts directs locaux d’une durée de 7 ans, sur délibération des collectivités (CGI, art. 1383 D et 1466 D), ainsi que d’une exonération de charges sociales patronales sur les rémunérations versées aux personnels participant à la recherche (LF 2004, art. 131).

Ce statut donne, par ailleurs, droit à une restitution immédiate du CIR.

LF 2024

Suppression du mécanisme d’exonération d’imposition sur les bénéfices (art. 69)

Le mécanisme d’exonération d’imposition des bénéfices est supprimé pour les JEI créées à compter du 1er janvier 2024.

En revanche, l’exonération de cotisations sociales et les exonérations d’impôts locaux sont, elles, maintenues.

Accès renforcé à la commande publique (art. 44)

Le Code de la commande publique (art. L. 2172-3) est modifié pour indiquer que sont considérés comme innovants tous les travaux, les fournitures ou les services proposés par les JEI, de sorte que ces dernières seraient désormais éligibles aux partenariats d’innovation.

Création du statut de JEIC – Jeune entreprise d’innovation et de croissance (art. 44)

Le statut de JEIC (Jeune entreprise d’innovation et de croissance) est ouvert à compter du 1er janvier 2024, aux entreprises remplissant toutes les conditions pour être considérées comme des JEI « de droit commun » au sens des dispositions de l’article 44 sexies-0 A.

Par dérogation, la condition tenant à l’importance des dépenses de R&D réalisées est assouplie (dépenses de R&D représentant entre 5 % et 15 % de ses charges).

En contrepartie, ces entreprises devront satisfaire à des indicateurs de performance économique définis selon des modalités à préciser par décret.

Elles bénéficieront alors de l’ensemble des avantages attachés au statut de JEI.

On notera que la LF 2024 n’instaure finalement pas la catégorie de « JEIR » (Jeune entreprise d’innovation et de rupture), plébiscitée par le rapport du député Paul Midy.

Extension du dispositif « IR-PME » aux souscriptions en numéraire réalisées au capital de JEI/JEIC (art. 48)

Rappel

Pour mémoire, les contribuables fiscalement domiciliés en France peuvent bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu au titre des souscriptions en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital de certaines sociétés non cotées (CGI, art. 199 terdecies-0 A, également dit mécanisme IR-PME). 

Cette réduction est égale à 18 % des versements effectués au titre de l’ensemble des souscriptions éligibles (25 % pour les versements effectués entre le 10 août 2020 et le 31 décembre 2023).

Les versements sont retenus dans la limite annuelle de 50 000 € pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés, ou de 100 000 € pour les contribuables mariés ou pacsés soumis à une imposition commune.

La fraction des investissements excédant la limite annuelle ouvre droit à la réduction d’impôt dans les mêmes conditions au titre des 4 années suivantes.

LF 2024

La LF 2024 prévoit l’extension du dispositif « IR-PME » aux souscriptions en numéraire réalisées, entre le 1er janvier 2024 et le 31 décembre 2028, directement ou indirectement, au capital d’une JEI ou d’une JEIC.

Le taux de la réduction d’impôt sera porté à :

  • 30 % en cas de souscription au capital d’une JEI ou d’une JEIC (versements retenus dans la limite annuelle de 75 000 € pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés, ou de 150 000 € pour les contribuables mariés ou pacsés soumis à une imposition commune) ;
  • 50 % en cas de souscription au capital d’une JEI, dont les dépenses de R&D représentent plus de 30 % de ses charges déductibles (versements retenus dans la limite annuelle de 50 000 € pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés, ou de 100 000 € pour les contribuables mariés ou pacsés soumis à une imposition commune).

En revanche, contrairement au dispositif « IR-PME » de droit commun, aucun mécanisme de report n’est prévu.

Le total de l’avantage ne pourra pas procurer une réduction de l’impôt dû supérieure à 50 000 € sur la période du 1er janvier 2024 au 31 décembre 2028.

Enfin, le dispositif est subordonné à la législation européenne relative aux aides de minimis.

Prorogation du crédit d’impôt « cinéma international » (art. 56

Rappel 

Peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt, pour leurs opérations effectuées en France pour la réalisation d’œuvres cinématographiques produites par des entreprises établies hors de France, les entreprises de production exécutive cinématographique et audiovisuelle soumises à l’IS (CGI, art. 220 quaterdecies).  

Le taux de ce crédit d’impôt est fixé à 30 %. La LF 2020 est venue majorer ce taux à 40 % pour les œuvres cinématographiques ou audiovisuelles de fiction à forts effets visuels dès lors que, au sein du budget de production, le montant total des dépenses éligibles afférentes aux travaux de traitement numérique des plans, est supérieur à 2 m€.

Ce dispositif avait vocation à prendre fin au titre des dépenses exposées à compter du 31 décembre 2024.

LF 2024 

La LF prévoit de proroger le crédit d’impôt « cinéma international » au titre des dépenses exposées jusqu’au 31 décembre 2026.

Micro-BIC – Harmonisation des modalités d’imposition des activités de location meublée touristique et des autres activités de location meublée (art. 45)

Rappel

Pour mémoire, le régime micro-BIC repose sur la détermination du bénéfice imposable par application d’un abattement forfaitaire au montant du chiffre d’affaires (CGI, art. 50-0).

Il s’applique aux exploitants individuels dont le CA HT de l’année précédente n’excède pas une limite fixée à :

  • 188 700 € pour les entreprises dont l’activité principale est la vente de marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place, ou la fourniture de logements à l’exclusion de la location de locaux meublés autres que les meublés de tourisme et les chambres d’hôtes. Dans ce cas, l’abattement forfaitaire est fixé à 71 %.
  • 77 700 € pour les autres entreprises – et donc pour toutes les autres activités de location meublée. Dans ce cas, l’abattement forfaitaire est fixé à 50 %.

LF 2024

Le régime micro-BIC applicable aux activités de location de meublés touristiques est désormais aligné sur celui applicable aux autres activités de location meublée (seuil de CA max de 77 700 € + abattement forfaitaire de 50 %).

Un abattement supplémentaire de 21 % est créé en faveur des entreprises déployant une activité de location de locaux meublés touristiques, à la double condition que :

  • Ces biens ne soient pas situés dans des zones géographiques se caractérisant par un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements ;
  • Le CA HT afférent à l’ensemble de leurs activités de location meublée soit inférieur à 50 000 €.

En l’absence de précision, la mesure est applicable à l’IR dû au titre de l’année 2023 et des années suivantes.

Prix de transfert

Renforcement du contrôle des prix de transfert des entreprises multinationales (art. 116)

La LF 2024 met en musique les mesures annoncées dans le plan de lutte contre toutes les fraudes aux finances publiques, dévoilé par le Gouvernement en mai 2023.

Baisse du seuil au-delà duquel les groupes sont tenus de présenter une documentation de leur politique de prix de transfert

En application des dispositions de l’article L. 13 AA du LPF, sont tenues de préparer une documentation relative à leurs prix de transfert pour la présenter à l’Administration en cas de contrôle, les sociétés établies en France :

  • Dont le chiffre d’affaires annuel hors taxes ou l’actif brut figurant au bilan est supérieur ou égal à 400 m€ ;
  • Ou qui détiennent à la clôture de l’exercice, directement ou indirectement, plus de la moitié du capital ou des droits de vote d’une entité juridique dont le chiffre d’affaires annuel hors taxes ou l’actif brut figurant au bilan est supérieur ou égal à 400 m€ ;
  • Ou qui sont détenues dans les mêmes conditions par une telle entité ;
  • Ou qui appartiennent à un groupe intégré comprenant au moins une entité satisfaisant à l’une des 3 conditions susmentionnées.

Les établissements stables français des sociétés étrangères sont également visés, dans les mêmes conditions.

Le seuil de 400 m€ est désormais abaissé à 150 m€, pour une application aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2024.

Renforcement des sanctions en l’absence de communication de la documentation prix de transfert

Pour mémoire, si l’entreprise vérifiée ne produit pas la documentation prix de transfert prévue aux articles L. 13 AA et L. 13 AB du LPF, ou produit une documentation partielle dans le délai de 30 jours suivant la réception de la mise en demeure, elle est passible, pour chacun des exercices couverts par la vérification, d’une amende minimale de 10 k€, qui peut être portée au plus élevé des 2 montants suivants, selon la gravité des manquements :

  • 0,5 % du montant des transactions concernées par les documents ou compléments qui n’ont pas été mis à la disposition de l’Administration après mise en demeure ;
  • 5 % des rectifications du résultat fondées sur l’article 57 du CGI, appréciées à l’issue du contrôle et afférentes aux transactions concernées par les documents ou compléments qui n’ont pas été mis à la disposition de l’Administration après mise en demeure.

Le montant de l’amende minimale est porté de 10 k€ à 50 k€.

Opposabilité de la documentation prix de transfert

Dans l’hypothèse où la méthode de détermination des prix de transfert d’une entreprise s’écarte de celle mise à la disposition de l’Administration en application des dispositions des articles L. 13 AA et L. 13 AB du LPF (obligation de présentation d’une documentation prix de transfert en cas de contrôle pesant sur les plus grandes entreprises), l’écart constaté entre le résultat et le montant qu’il aurait atteint si cette documentation avait été respectée sera réputé constituer un transfert indirect de bénéfices à l’étranger au sens de l’article 57 du CGI.

Il n’en ira autrement que dans l’hypothèse où la société sera à même de démontrer l’absence de transfert soit par voie de majoration ou de diminution des prix d’achat ou de vente, soit par tout autre moyen.

La mesure s’appliquera aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2024.

Extension du délai de reprise dont dispose l’Administration pour les transferts d’actifs incorporels difficiles à évaluer (‘HTVI’)

L’Administration disposera désormais de la faculté de redresser la valeur retenue dans le cadre d’un transfert d’un actif ou d’un droit incorporel difficile à évaluer (‘HTVI’) sur la base de résultats postérieurs à l’exercice au cours duquel a eu lieu la transaction (CGI, art. 238 bis-0 I ter nouveau).

Son droit de reprise pourra s’exercer jusqu’à la fin de la 6e année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due.

Notons que la notion d’actif incorporel difficile à évaluer est définie par renvoi à la législation DAC 6 sur le marqueur E.2 (CGI, art. 1649 AH, II, E, 2°), qui vise les transferts entre entreprises associées d’actifs incorporels pour lesquels, au moment de leur transfert, il n’existe pas d’éléments de comparaison fiables et où, au moment où l’opération a été conclue, les projections concernant les futurs flux de trésorerie ou revenus attendus de l’actif incorporel transféré, ou les hypothèses utilisées pour évaluer cet actif incorporel sont hautement incertaines, de sorte qu’il est difficile de prévoir dans quelle mesure l’actif incorporel débouchera finalement sur un succès au moment du transfert. Dans ses commentaires au BOFiP sur le marqueur E.2, l’Administration fait expressément référence aux Principes OCDE en matière de prix de transfert.

L’Administration ne sera toutefois pas en droit de remettre en cause la valeur retenue dans les différentes hypothèses suivantes :

  • Le contribuable, d’une part, fournit des informations détaillées sur les prévisions utilisées, au moment du transfert, pour déterminer les prix, notamment les modalités de prise en compte des risques et des événements raisonnablement prévisibles ainsi que leur probabilité de réalisation et, d’autre part, établit que la différence significative entre ces prévisions et les résultats réels est due soit à la survenance d’événements imprévisibles lors de la détermination du prix, soit à la réalisation d’événements prévisibles à condition que leur probabilité d’occurrence n’ait pas été sous-estimée ou surestimée de manière significative au moment de la transaction ;
  • Le transfert en cause est couvert par un accord préalable en matière de prix bilatéral ou multilatéral, en vigueur pour la période concernée, entre les Etats du cessionnaire et du cédant ;
  • L’écart entre la valorisation résultant des prévisions établies au moment de la transaction et celle constatée au vu des résultats réels est inférieur à 20 % ;
  • Une durée de commercialisation de 5 ans s’est écoulée après l’année au cours de laquelle l’actif ou droit a produit pour la 1ère fois des revenus provenant d’une entité non liée au concessionnaire et, durant cette période, l’écart entre les prévisions établies au moment de la transaction et les résultats réels est inférieur à 20 %.

Par ailleurs, une nouvelle exception à la garantie de non-renouvellement de la vérification de comptabilité prévue à l’article L. 51 du LPF est prévue en la matière.

Ces mesures s’appliqueront aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2024.

Fiscalité des personnes

Indexation sur l’inflation du barème de l’IR pour les revenus de 2023 et des grilles de taux par défaut du PAS (art. 2)

Comme chaque année, la LF revalorise les tranches du barème de l’IR ainsi que les limites et seuils de réductions d’impôt lui étant associés par indexation sur la prévision d’évolution de l’indice des prix hors tabac de 2023 par rapport à 2022, soit 4,8 %.

Ces aménagements s’appliqueront à l’IR dû au titre de l’année 2023 et des années suivantes.

Par ailleurs, les tranches de revenus des grilles de taux par défaut utilisées par le collecteur de la RAS lorsque le contribuable a opté pour le PAS ou lorsqu’il ne dispose pas du taux de PAS communiqué par l’Administration, sont également ajustées (CGI, art. 204 H).

PEA : Précisions sur l’imposition des PV de placements effectués en ORA non cotées (art. 8)

La loi PACTE a rendu éligibles au plan d’épargne en actions des PME les obligations remboursables en actions (ORA) non cotées (loi du 22 mai 2019, n°2019-486, art. 93).

Par principe, les profits réalisés dans le cadre d’un PEA, ne sont, pendant la durée du plan, pas imposables à l’impôt sur le revenu (CGI, art. 157, 5° bis). Par exception, les produits de placements effectués en ORA lorsque ces obligations ne sont pas cotées ou sont remboursables en actions qui ne sont pas cotées, bénéficient de cette exonération uniquement dans la limite de 10 % du montant de ces placements.

Par ailleurs, les plus-values procurées par des placements effectués en ORA non cotées lors de la cession ou du retrait des obligations, ou des actions reçues en remboursement de ces obligations, sont uniquement exonérées dans la limite du double du montant du placement.

La LF vient préciser que la fraction du gain net réalisé en cas de retrait de ces obligations/actions reçues en remboursement de ces obligations, supérieure au double du montant du placement, serait imposée au PFU (ou au barème progressif de l’IR en cas d’option). Cette imposition est susceptible de concerner tous les retraits de titres, que ceux-ci interviennent avant l’expiration de la 5e année du PEA, ou après (CGI, art. 150-0 A, II, 2, b) nouveau).

En l’absence de précision, la mesure s’appliquera à l’impôt sur le revenu dû au titre de l’année 2023 et des années suivantes.

Extension du champ de l’article 155 A du CGI (rémunérations de prestations de services versées à l’étranger) (art. 10)

Pour mémoire, l’article 155 A, I du CGI vise à dissuader les contribuables susceptibles d’être soumis à l’IR en France (prestataires réels) de se soustraire à cet impôt en faisant percevoir leur rémunération pour services rendus par des personnes physiques ou morales établies à l’étranger (personnes interposées).

Ainsi, les sommes perçues par une personne domiciliée ou établie hors de France en rémunération de services rendus par une ou plusieurs personnes domiciliées ou établies en France sont imposables en France au nom de ces dernières :

  • lorsque ce prestataire réel contrôle directement ou indirectement la personne interposée ;
  • ou lorsque ce prestataire réel n’établit pas que la personne interposée exerce, de manière prépondérante, une activité industrielle ou commerciale, autre que la prestation de services ;
  • ou lorsque la personne interposée est domiciliée ou établie dans un pays étranger où elle est soumise à un régime fiscal privilégié, au sens de l’article 238 A du CGI.

Ce régime est également applicable aux personnes domiciliées hors de France pour les services rendus en France (CGI, art. 155 A, II).

La LF 2024 vient élargir le champ d’application de l’article 155 A du CGI à l’intégralité des sommes perçues en « contrepartie de services ou de l’exploitation commerciale de droits attachés à l’image, au nom ou à la voix d’une ou plusieurs personnes, de l’usage de droits d’auteurs ou droits voisins, ou de la propriété industrielle ou commerciale ou de droits assimilés, rendus ou concédés », au lieu des seules sommes perçues en rémunération de prestations de services.

Cette extension des rémunérations entrant dans le champ de l’article 155 A du CGI vient mettre un coup d’arrêt aux récentes décisions du Conseil d’Etat ayant jugé que les redevances perçues par des sociétés étrangères pour l’utilisation de marques / brevets / logos préalablement cédés par un contribuable ne pouvaient être regardées comme la rémunération d’un service rendu par le contribuable au sens du I de l’article 155 A du CGI (voir CE, 5 novembre 2021, n°433367 et CE, 8 juin 2020, n°418962).

Par ailleurs, la LF 2024 tire les conséquences de la réserve d’interprétation formulée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 26 novembre 2010 concernant l’article 155 A du CGI (n°2010-70 QPC), en y insérant une disposition relative à l’élimination de la double imposition des rémunérations entrant dans son champ d’application.

Il est ainsi précisé que dans le cas où la personne domiciliée ou établie à l’étranger reverse au contribuable domicilié en France tout ou partie des sommes imposées conformément à l’article 155 A, I du CGI, l’impôt correspondant à ce revenu est réputé avoir déjà été acquitté.

En revanche, la personne qui perçoit les sommes sera désormais solidairement responsable, à hauteur de ces dernières, des impositions dues par la personne qui rend les services ou concède l’exploitation des droits ou l’usage des droits concernés.

Ces aménagements seront applicables aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2024.

Aménagement du dispositif de l’exit tax (art. 11)

Rappel de la règle

Les contribuables qui transfèrent leur domicile fiscal hors de France sont, en principe, imposables à l’IR et aux prélèvements sociaux, au titre des plus-values latentes, des créances trouvant leur origine dans une clause de complément de prix, et des plus-values en report d’imposition.

Les contribuables soumis à cette « exit tax » peuvent toutefois bénéficier, dans certains cas et sous réserve du respect d’un certain nombre de conditions, d’un sursis de paiement et d’un dégrèvement d’impôt (CGI, art. 167 bis).

Il leur faut notamment se conformer à certaines obligations déclaratives :

  • Déclaration des plus-values et créances imposables, au titre de l’année suivant le transfert de leur domicile fiscal hors de France (CGI, art. 167 bis, IX, 1) ;
  • Déclaration annuelle de suivi du sursis de paiement (CGI, art. 167 bis, IX, 2).

Le défaut de production de l’une ou l’autre de ces déclarations, ainsi que l’omission de tout ou partie des renseignements devant y figurer, entraîne l’exigibilité immédiate de l’impôt en sursis de paiement.

En cas de survenance d’un événement entraînant le dégrèvement ou la restitution de l’impôt (conservation des titres durant un certain délai, retour en France, donation de titres, décès du contribuable), le contribuable (ou, en cas de décès, ses héritiers ou ayants droit), est tenu de demander selon le cas, le dégrèvement ou la restitution de l’impôt concerné par cet événement, au plus tard le 2e jour ouvré suivant le 1er avril de l’année suivant la réalisation de l’évènement (CGI, art. 167 bis, IX, 3 et 175).

LF 2024

La LF 2024 applique au défaut de production de la déclaration de sortie du dispositif de l’exit tax (i.e. demande de dégrèvement ou de restitution) la même sanction que celle prévue en cas de non-dépôt de la déclaration du transfert du domicile hors de France ou de suivi annuel du sursis de paiement.

Ainsi, le fait pour un contribuable (ou pour ses héritiers en cas de décès du contribuable) de ne pas procéder, dans les délais prescrits, à la déclaration d’un évènement entraînant le dégrèvement ou la restitution d’exit tax entraînera l’exigibilité immédiate de l’impôt en sursis de paiement.

Cette mesure s’appliquera aux défauts de production des déclarations portant sur les éléments nécessaires au calcul de l’IR dû en 2024 sur les revenus de l’année 2023, dans l’hypothèse où l’évènement ayant entraîné le dégrèvement/la restitution de l’exit tax serait antérieur à l’entrée en vigueur de la LF 2024.

Par ailleurs, la LF 2024 étend le dégrèvement de prélèvements sociaux dont bénéficient les contribuables sur les plus-values latentes sur les droits ou valeurs conservés pendant un certain nombre d’années, lorsque le transfert de leur domicile fiscal est intervenu à compter du 1er janvier 2014, aux contribuables ayant transféré leur domicile fiscal avant cette date (LFR 2013, n°2013-1279, art. 42, II et III ; Code de la sécurité sociale, art. L. 136-6).

Prorogation de la réduction d’impôt « SOFICA » (art. 13)

Rappel

Les contribuables fiscalement domiciliés en France peuvent bénéficier, sous conditions, d’une réduction d’impôt au titre des souscriptions en numéraire, réalisées entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2023, au capital initial ou aux augmentations de capital des sociétés ayant pour activité le financement de l’industrie cinématographique et audiovisuelle – SOFICA – agréées par le Ministère de la culture (CGI, art. 199 unvicies).

La réduction d’impôt est égale à 30 % des sommes effectivement versées au titre des souscriptions au cours de l’année d’imposition, retenues dans la double limite de 25 % du revenu net global et de 18 000 €. Ce taux peut être majoré dans certains cas de figure.

LF 2024

Le dispositif est prorogé, pour une application aux souscriptions/augmentations de capital réalisées jusqu’au 31 décembre 2026.

Changement de paradigme du PAS pour les couples soumis à imposition commune : Le taux individualisé devient la norme (art. 19)

Rappel

Depuis le 1er janvier 2019, le prélèvement à la source (PAS) constitue le régime de droit commun du paiement de l’impôt sur le revenu.

Il concerne la majorité des revenus perçus par les contribuables (revenus d’activité et de remplacement, revenus fonciers).

Selon la nature du revenu, il prend la forme d’une RAS pratiquée par le débiteur des revenus, ou celle d’un acompte directement prélevé par l’Administration sur le compte bancaire du contribuable.

Les couples mariés ou liés par un pacte civil de solidarité (PACS), soumis à une imposition commune, se voient appliquer, par principe, un taux de prélèvement à la source calculé au niveau du foyer fiscal.

Ils peuvent néanmoins opter pour l’application, pour leurs seuls revenus, d’un taux individualisé (CGI, art. 204 E).

En cas d’exercice de cette option, le taux individualisé de chaque conjoint ou partenaire s’applique exclusivement aux revenus dont il dispose personnellement. Les revenus communs du foyer fiscal demeurent soumis au taux de prélèvement du foyer (BOI-IR-PAS-20-20-20-20220516).

LF 2024

La LF prévoit d’inverser ce paradigme en appliquant, par défaut, un taux individualisé à chacun des conjoints. Il leur sera toujours possible d’opter pour le taux du foyer fiscal.

L’entrée en vigueur de cette mesure, prévue par la LF, est fixée au 1er septembre 2025.

« Dutreil transmission » : Précisions sur le champ d’application du dispositif (art. 23)

Pour mémoire, les parts ou actions de sociétés ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, ayant fait l’objet d’engagements de conservation (engagement collectif de conservation d’une durée de 2 ans suivi d’engagements individuels de conservation d’une durée de 4 ans à compter de la date d’expiration du précédent délai), transmises par décès ou donation, sont exonérées de droits de mutation à titre gratuit, à concurrence de 75 % de leur valeur (CGI, art. 787 B). Ce régime est communément appelé le « Dutreil transmission ».

De manière similaire, les biens meubles et immeubles, corporels ou incorporels, affectés à l’exploitation d’une entreprise individuelle ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, transmis par décès ou donation, sont exonérés de droits de mutation à titre gratuit, à concurrence de 75 % de leur valeur, sous réserve du respect de certaines conditions (CGI, art. 787 C).

La LF 2024 apporte des précisions notables sur le champ d’application de ces dispositifs.

Tolérance concernant l’exercice d’une activité mixte

Pour rappel, le régime d’exonération de DMTG des transmissions d’entreprises, est réservé aux entreprises ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, à l’exclusion des activités de nature civile (CGI, art 787 B et 787 C). 

L’Administration indique, dans ses commentaires au BOFiP, qu’il suffit que cette activité soit exercée de manière prépondérante pour être éligible au « Dutreil transmission » (BOI-ENR-DMTG-10-20-40-10, 21/12/2021, § 20 pour les transmissions de parts ou actions de sociétés, et BOI-ENR-DMTG-10-20-40-40, 06/04/2021, §15 pour les transmissions d’entreprises individuelles).

Le Conseil d’Etat, comme la Cour de cassation, ont jugé que le caractère prépondérant de l’activité devait s’apprécier en fonction d’un faisceau d’indices déterminés d’après la nature de l’activité et les conditions de son exercice (CE, 23 janvier 2020, n°435562 et C. cass., 25 janvier 2023, n°20-23.137).

La LF 2024 légalise – sans la préciser davantage – cette tolérance administrative, en indiquant que seront éligibles au dispositif les sociétés/entreprises individuelles « dont l’activité principale est industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale ».

Restriction du champ des activités commerciales éligibles

Pour rappel, au cours de l’année 2023, l’éligibilité de certaines activités – activités de location notamment – a fait débat, la Cour de cassation retenant une définition très large de la notion d’activité commerciale. Elle a ainsi jugé que :

  • L’activité de loueur d’établissements commerciaux ou industriels munis d’équipements nécessaires à leur exploitation constituait une activité commerciale éligible au sens de l’article 787 B du CGI ( com., 1 juin 2023, n°22-15.152) ;
  • L’activité de location touristique exercée indirectement par une entreprise individuelle était susceptible de constituer une activité commerciale éligible au sens de l’article 787 C du CGI ( com., 21 juin 2023, n°21-18.226).

Le Conseil d’Etat semble par ailleurs avoir tout récemment ouvert la voie à l’application de l’exonération Dutreil aux activités de location de locaux meublés à usage d’habitation, en jugeant qu’aucune disposition législative ne permet de dénier de manière générale à la location de locaux meublés à usage d’habitation le caractère d’activité commerciale au sens des articles 787 B et 787 C du CGI (CE, 29 septembre 2023, n°473972).

La LF 2024 vient faire échec à ces décisions favorables, en précisant que les activités commerciales éligibles à l’exonération partielle de DMTG s’entendent des activités commerciales au sens des articles 34 et 35 du CGI, à l’exception notable « de toute activité de gestion de son propre patrimoine mobilier ou immobilier ».

Eligibilité encadrée des parts ou actions de sociétés holdings animatrices

Pour rappel, l’activité financière des sociétés holdings les exclut normalement du champ d’application de l’exonération de 75 % des DMTG prévue par l’article 787 B du CGI (transmission de parts ou actions de sociétés). L’Administration admet toutefois, de longue date, d’étendre le bénéfice de cette exonération partielle aux sociétés holdings animatrices de leur groupe, dès lors que le groupe a pour activité, une activité éligible (BOI-ENR-DMTG-10-20-40-10, 21/12/2021, § 50 et s.).

La LF 2024 légalise cette tolérance.

Ainsi, les sociétés holding animatrices bénéficieront du régime « Dutreil transmission », dès lors qu’en sus de la gestion d’un portefeuille de participations, elles ont pour activité principale « la participation active à la conduite de la politique de son groupe constitué de sociétés contrôlées directement ou indirectement, exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, et auxquelles elle rend, le cas échéant et à titre purement interne, des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers » (reprise des critères jurisprudentiels dégagés par CE, 13 juin 2018, n°395495 et C. cass., 14 octobre 2020, n°18-17.955).

L’ensemble de ces dispositions sont applicables aux transmissions intervenant à compter du 17 octobre 2023.

Evènement mettant fin au report d’imposition de l’article 150-0 B ter du CGI : Aménagement de l’exception en cas de réinvestissement économique via des structures de capital investissement (art. 24)

Rappel

En cas d’apport de titres réalisé par une personne physique en faveur d’une société contrôlée, l’opération bénéficie automatiquement d’un report d’imposition spécifique, pour autant que l’apport de titres soit réalisé au profit d’une société établie dans un Etat membre de l’Union européenne ou dans un Etat ou territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale contenant une clause d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales (CGI, art. 150-0 B ter).

Ce report expire en cas de cession dans un délai de 3 ans, par la société bénéficiaire de l’apport, des titres qui lui ont été apportés, sauf à ce qu’elle prenne l’engagement de réinvestir dans un délai de 2 ans le produit de cette cession, à hauteur d’au moins 60 % dans certaines activités opérationnelles.

Ce réinvestissement peut notamment être réalisé par la souscription de parts ou actions de certaines structures d’investissement (FCPR [fonds communs de placement à risques], FPCI [fonds professionnels de capital investissement], SLP [sociétés de libre partenariat], SCR [sociétés de capital-risque]), qui doivent elles-mêmes respecter un quota d’investissement minimum dans des sociétés opérationnelles.

Cette modalité spécifique de réinvestissement est cependant très encadrée. Ainsi, les sommes que la société s’est engagée à réinvestir doivent être effectivement versées à la structure d’investissement dans un délai de 5 ans suivant la signature de l’engagement.

En outre, la composition de l’actif de ces structures d’investissement doit satisfaire à un certain nombre de conditions.

Il doit ainsi être composé, à hauteur de 75 % au moins, de parts ou actions reçues en contrepartie de la souscription en numéraire au capital initial ou à l’augmentation de capital de sociétés exerçant une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale, agricole ou financière, ou de parts ou actions émises par de telles sociétés lorsque leur acquisition leur en confère le contrôle, ou lorsque le fonds, la société ou l’organisme est partie à un pacte d’associés ou d’actionnaires et détient plus de 25 % du capital et des droits de vote d’une telle société concernée par ce pacte à l’issue de cette acquisition.

LF 2024

La LF 2024 vient modifier les règles régissant la composition de ces structures d’investissement.

Ainsi, les modalités de calcul et d’investissement du quota de 75 % devant être respecté par les fonds, les SLP ou organismes équivalents sont désormais définies par référence au « quota d’investissement » prévu par l’article 163 quinquies B, II, porté à 75 %. De même, les sociétés de capital-risque seront tenues de respecter un quota d’investissement spécifique (quota fixé par l’article 1-1 de la loi n°85-695 du 11 juillet 1985, porté à 75 %).

Il est précisé que l’investissement pris en compte dans ce quota devra s’effectuer sous la forme :

  • De souscriptions en numéraire au capital initial ou à l’augmentation de capital de la société.
  • D’acquisitions de parts ou actions émises par la société si (i) l’acquisition en confère le contrôle ou si (ii) le fonds, la société ou l’organisme est partie à un pacte d’associés ou d’actionnaires et détient plus d’un quart du capital et des droits de vote de la société concernée par ce pacte à l’issue de cette acquisition.
    A défaut, ces acquisitions seraient admises dans la limite de 10 % du montant total de l’investissement dans la société pris en compte dans le quota.
  • De titres donnant accès au capital de la société, d’avances en compte courant ou de titres de créance émis par la société, dans la limite de 10 % du montant total de l’investissement dans la société pris en compte dans le quota.

La mesure s’appliquera aux souscriptions portant sur des parts ou actions de fonds, sociétés et organismes constitués à compter du 29 décembre 2023 – date de promulgation de la loi de finances pour 2024 (avec une application possible, sur option, aux souscriptions portant sur des parts ou actions de FCPR, FPCI, SLP, SCR constitués antérieurement, sous réserve du respect de certaines conditions).

Donation des sommes d’argent en démembrement : Remise en cause de la déductibilité de la dette de restitution de l’actif successoral du quasi-usufruitier (art. 26)

Rappel

La donation de la nue-propriété d’une somme d’argent entraîne l’obligation pour l’usufruitier de restituer le bien objet du quasi-usufruit, en l’occurrence la somme d’argent (Code civil, art. 587), qui prend fin à la constitution de la pleine propriété entre les mains de l’ex-nu propriétaire – à l’occasion du décès de l’usufruitier par exemple.

La donation de la nue-propriété (de la somme d’argent) est soumise à une imposition réduite aux DMTG. Ces derniers sont déterminés par un pourcentage de la valeur de la pleine propriété, selon un barème déterminé en fonction de l’âge de l’usufruitier au moment de la donation (CGI, art. 669) :

 

La constitution de la pleine propriété entre les mains de l’ex-nu propriétaire s’effectue en franchise de droit, en cas de décès de l’usufruitier (CGI, art. 1133).

Par ailleurs, pour la liquidation des droits de mutation par décès, la dette de restitution du quasi-usufruit, égale au montant de la somme donnée en nue-propriété, est déduite à l’actif de la succession du quasi-usufruitier lors de son décès. L’article 768 du CGI prévoit, en effet, que les dettes à la charge du défunt sont déduites lorsque leur existence au jour de la succession est dûment justifiée par tous modes de preuve.

LF 2024

La LF 2024 institue un dispositif anti-abus en matière de DMTG conduisant à la non-déductibilité, à l’actif successoral, de la dette de restitution portant sur une somme d’argent dont le défunt s’était réservé l’usufruit et avait donné la nue-propriété (CGI, art. 774 bis, I nouveau).

Cependant, la déductibilité sera maintenue dans le cadre de 2 exceptions prévues par le texte :

  • les dettes de restitution contractées sur le prix de cession d’un bien dont le défunt s’était réservé l’usufruit, sous réserve qu’il soit justifié que ces dettes n’ont pas été contractées dans un but principalement fiscal ; et
  • dans le cas des usufruits résultant d’une transmission par décès au conjoint survivant (Code civil, art. 757 et 1094-1).

Par ailleurs, en ce qui concerne le régime fiscal appliqué à la réunion de l’usufruit et de la nue-propriété, le II de l’article 774 bis nouveau vient déroger à la franchise d’impôt prévue à l’article 1133 du CGI précité. La valeur correspondant à la dette de restitution qui ne vient pas réduire la valeur de l’actif successoral donnera donc lieu à la perception de droits de mutation par décès dus par le nu-propriétaire et calculés d’après le degré de parenté existant entre ce dernier et l’usufruitier, si les droits dus sont inférieurs.

Les droits déjà acquittés par le nu-propriétaire, lors de la donation de la nue-propriété avec réserve d’usufruit, seront toutefois imputables sur les droits de succession dus par le nu-propriétaire lors de la réunion de la nue-propriété et de l’usufruit, sans pouvoir néanmoins donner lieu à restitution si ceux-ci venaient à leur être supérieurs (CGI, art. 774 bis, II nouveau).

Cette mesure est applicable aux successions ouvertes à compter du 29 décembre 2023 (date de promulgation de la loi de finances pour 2024).

IFI : Aménagement des règles de valorisation des parts ou actions de sociétés à hauteur de la fraction de leur valeur représentative de biens ou droits immobiliers (art. 27)

Rappel

Les parts ou actions de sociétés et organismes (établis en France ou à l’étranger), sont imposables à l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) à hauteur de la fraction de leur valeur représentative de biens ou droits immobiliers détenus directement ou indirectement par la société ou l’organisme.

Le redevable doit donc déterminer la valeur vénale de ces titres (en suivant les règles en vigueur en matière de mutation par décès – avec des modalités d’évaluation spécifiques pour les valeurs mobilières cotées), puis lui appliquer un coefficient de taxation correspondant au ratio immobilier de la société.

Des règles anti-abus font obstacle à ce que, dans le cadre de cette évaluation, soient prises en compte certaines dettes contractées, directement ou indirectement, par la société ou l’organisme notamment auprès du redevable et des personnes de son foyer fiscal ou de son groupe familial (CGI, art. 973, II).

Il ne doit ainsi pas être tenu compte des dettes contractées :

  • Pour l’achat au redevable de l’IFI d’un actif immobilier imposable par une société qu’il contrôle ;
  • Pour l’acquisition d’un actif imposable auprès du redevable de l’IFI ou d’un membre de son foyer fiscal/groupe familial ;
  • Pour l’acquisition d’un actif imposable auprès d’une société contrôlée directement ou indirectement par le redevable de l’IFI.

Des clauses de sauvegarde sont toutefois prévues.

Des règles particulières sont également prévues en cas de prêts « in fine » ou sans terme (CGI, art. 973, III).

LF 2024

La LF 2024 vient compléter ces règles, en précisant que pour la valorisation de ces parts ou actions, il ne doit pas être tenu compte des dettes contractées directement ou indirectement par un organisme ou une société et qui ne sont pas afférentes à un actif immobilier imposable.

Il est expressément précisé que l’application de cette mesure ne doit pas avoir pour conséquence de porter la valeur des parts ou actions de sociétés imposables à l’IFI à un montant supérieur à celui de la valeur vénale de ces parts ou actions déterminée en application des règles en vigueur en matière de droits de mutation par décès (i.e. règle de principe, précitée, pour la valorisation des actifs soumis à l’IFI).

Par ailleurs, si la valeur des parts ou actions de sociétés imposables à l’IFI, déterminée en application de cette nouvelle règle de valorisation, se trouve être inférieure à la valeur vénale desdites parts ou actions déterminées dans les règles de droit commun, elle ne pourra pour autant pas excéder la valeur vénale des actifs de la société diminuée des dettes y afférentes qu’elle a contractées, à proportion de la fraction de capital de la société à laquelle donnent droit les parts ou actions comprises dans le patrimoine du redevable.

Selon l’exposé des motifs, l’idée est de plafonner la valeur imposable à l’IFI des droits sociaux résultant de l’exclusion des passifs afférents à des actifs non imposables à la fraction de la valeur nette des actifs immobiliers imposables à l’IFI.

Cette mesure s’appliquera à l’IFI dû à compter de 2024.

Réflexions autour de l’instauration d’une imposition minimale internationale des personnes physiques (art. 33)

Le Gouvernement devra remettre au Parlement un rapport relatif à la mise en œuvre de l’imposition minimale internationale des personnes physiques, avant le dépôt du PLF 2025 (en pratique, avant fin septembre 2024).

Cryptoactifs : Extension du champ de l’obligation déclarative relative aux actifs numériques (art. 47)

Rappel

L’article 1649 bis C du CGI prévoit que « les personnes physiques, les associations, les sociétés n’ayant pas la forme commerciale, domiciliées ou établies en France, sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes d’actifs numériques mentionnés à l’article 150 VH bis ouverts, détenus, utilisés ou clos auprès d’entreprises, personnes morales, institutions ou organismes établis à l’étranger ».

LF 2024

A compter du 1er janvier 2024, l’obligation déclarative de l’article 1649 bis C est étendue à « toutes personnes ou entités juridiques, domiciliées ou établies en France ».

On notera qu’au cours des débats parlementaires, avait été adopté un amendement prévoyant l’imposition des bénéfices issus des activités de « minage » dans la catégorie des BNC, dès leur perception.

La mesure a finalement été supprimée, pour permettre au Gouvernement, en concertation avec les représentants du secteur en France, d’établir un dispositif plus adapté, « en vue d’un prochain texte financier ».

Prorogation du taux majoré à 25 % du dispositif IR-PME (art. 49)

Pour mémoire, les contribuables fiscalement domiciliés en France peuvent bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu au titre des souscriptions en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital de certaines sociétés non cotées (CGI, art. 199 terdecies-0 A, également dit mécanisme IR-PME), ainsi que des « entreprises solidaires d’utilité sociale » (CGI, art. 199 terdecies-0 AA) et des « sociétés foncières solidaires » (CGI, art. 199 terdecies-0 AB).

Ce dispositif avait été renforcé dans le cadre de la LF 2018, qui avait relevé le taux de la réduction d’impôt de 18 % à 25 % pour les versements effectués jusqu’au 31 décembre 2018. Cette hausse du taux a été prorogée, à plusieurs reprises, pour s’appliquer aux versements effectués jusqu’au 31 décembre 2019 (LF 2019), aux versements effectués jusqu’au 31 décembre 2020 (LF 2020), aux versements effectués jusqu’au 31 décembre 2021 (LF 2021) aux versements effectués jusqu’au 31 décembre 2022 (LFR 2021), puis aux versements effectués jusqu’au 31 décembre 2023 (LF 2023).

Cependant ce taux majoré de 25 % n’a pu être appliqué de manière continue durant toute cette période, son application étant soumise à l’aval de la Commission européenne. A titre d’exemple on notera que le taux majoré actuellement en vigueur, prorogé par la LF 2023, s’applique aux versements effectués entre le 12 mars 2023 (date fixée par le décret n°2023-176 du 10 mars 2023 faisant suite à la décision de la Commission européenne autorisant l’application du taux majoré de 25 % pour 2023 – C(2023) 1036 final du 16 février 2023) et le 31 décembre 2023.

L’application de ce taux majoré de 25 % est, une nouvelle fois prorogée, mais seulement en ce qui concerne la réduction d’impôt au titre des investissements réalisés au capital des entreprises solidaires d’utilité sociale (CGI, art. 199 terdecies-0 AA) et des sociétés foncières solidaires (CGI, art. 199 terdecies-0 AB).

Ce taux majoré de 25 % s’appliquera aux versements effectués jusqu’au 31 décembre 2025.

Pour la réduction d’impôt au titre des investissements réalisés au capital des entreprises solidaires d’utilité sociale, la mesure n’entrera en vigueur qu’après approbation de la Commission européenne.

Contentieux et contrôle fiscal

Création d’un délit de mise à disposition d’instruments de facilitation de la fraude fiscale (art. 113)

La LF 2024 instaure un nouveau délit autonome de mise à disposition d’instruments de facilitation de la fraude fiscale (CGI, art. 1744 nouveau).

Serait punie de 3 ans d’emprisonnement et d’une amende de 250 k€ la mise à disposition, à titre gratuit ou onéreux, d’un ou plusieurs moyens, services, actes ou instruments juridiques, fiscaux, comptables ou financiers, ayant pour but de permettre à un ou des tiers de se soustraire frauduleusement à l’établissement ou au paiement total ou partiel de l’impôt.

Les moyens, services, actes ou instruments visés sont les suivants :

  • L’ouverture de comptes ou la souscription de contrats auprès d’organismes établis à l’étranger ;
  • L’interposition de personnes physiques ou morales ou de tout organisme, fiducie ou institution comparable établis à l’étranger ;
  • La fourniture d’une fausse identité ou de faux documents au sens de l’article 441-1 du Code pénal, ou de toute autre falsification ;
  • La mise à disposition ou la justification d’une domiciliation fiscale fictive ou artificielle à l’étranger ;
  • La réalisation de toute autre manœuvre destinée à égarer l’Administration.

Les peines prévues sont portées à 5 ans d’emprisonnement et 500 k€ d’amende lorsqu’une telle mise à disposition est commise en utilisant un service de communication au public en ligne.

Les articles L. 227 à L. 233 du LPF (prévoyant notamment qu’en cas de poursuite pénale, c’est au ministère public et à l’administration fiscale d’apporter la preuve du caractère intentionnel soit de la soustraction, soit de la tentative de soustraction à l’établissement et au paiement des impôts) ne seront pas applicables en pareille hypothèse.

Les personnes physiques qui se rendraient coupables d’un tel délit seraient en outre susceptibles de se voir appliquer les sanctions pénales prévues en cas de délit de fraude fiscale par l’article 1741 du CGI (également aménagé par la LF en son article 114, voir ci-après), ainsi que les sanctions prévues à larticle 1750 du CGI (interdiction d’exercer et suspension du permis de conduire).

Les personnes morales déclarées pénalement responsables du nouveau délit pourraient se voir également appliquer l’amende régie par les articles 131-37 et 131-38 du Code pénal ainsi que les peines prévues par les 1° à 6°, le 9° et le 12° de l’article 131-39 du même Code.

Peine complémentaire de privation des droits à réductions et crédits d’impôt sur le revenu et d’impôt sur la fortune immobilière en cas de délit de fraude fiscale (art. 114)

Pour mémoire, quiconque s’est frauduleusement soustrait ou a tenté de se soustraire frauduleusement à l’établissement ou au paiement total ou partiel des impôts visés dans la présente codification, soit qu’il ait volontairement omis de faire sa déclaration dans les délais prescrits, soit qu’il ait volontairement dissimulé une part des sommes sujettes à l’impôt, soit qu’il ait organisé son insolvabilité ou fait obstacle par d’autres manœuvres au recouvrement de l’impôt, soit en agissant de toute autre manière frauduleuse, est passible, indépendamment des sanctions fiscales applicables, d’un emprisonnement de 5 ans et d’une amende de 500 k€, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l’infraction (CGI, art. 1741).

En cas de fraude aggravée, ces peines sont portées à 7 ans d’emprisonnement et à une amende de 3 m€, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l’infraction.

Il y a fraude aggravée lorsque les faits ont été commis en bande organisée ou réalisés ou facilités au moyen de :

  • Comptes ouverts ou de contrats souscrits auprès d’organismes établis à l’étranger ;
  • L’interposition de personnes physiques ou morales ou de tout organisme, fiducie ou institution comparable établis à l’étranger ;
  • L’usage d’une fausse identité ou de faux documents, au sens de l’article 441-1 du Code pénal, ou de toute autre falsification ;
  • Domiciliation fiscale fictive ou artificielle à l’étranger ;
  • Ou d’un acte fictif ou artificiel ou de l’interposition d’une entité fictive ou artificielle.

La LF 2024 vient compléter les sanctions applicables en cas de fraude aggravée, du recel de ces délits ou de leur blanchiment, en y ajoutant, à titre de peine complémentaire, la privation du droit à l’octroi de réductions ou crédits d’impôt sur le revenu ou sur la fortune immobilière, pour une durée ne pouvant excéder 3 ans débutant à compter de l’imposition des revenus de l’année qui suit celle de la condamnation.

Les crédits d’impôt octroyés en application d’une convention fiscale internationale sont toutefois exclus du champ d’application de cette peine complémentaire.

En l’absence d’entrée en vigueur spécifique, cette mesure devrait s’appliquer aux infractions commises à compter du 1er janvier 2024.

Aménagement des modalités de réalisation des contrôles fiscaux (art. 117)

Pour mémoire, lorsque l’Administration procède à une vérification de comptabilité, elle doit effectuer le contrôle dans les locaux de l’entreprise (LPF, art. L. 13).

La possibilité est désormais donnée à l’Administration de proposer que la vérification puisse se tenir ou se poursuivre dans tout autre lieu déterminé d’un commun accord entre le contribuable et l’Administration. A défaut d’accord, l’Administration pourra décider de tenir ou de poursuivre la vérification dans ses propres locaux.

Cette possibilité est également déclinée aux contrôles de la régularité de la délivrance des reçus, des attestations ou de tous autres documents par lesquels les organismes bénéficiaires de dons et versements indiquent à un contribuable qu’il est en droit de bénéficier des réductions d’impôt prévues aux articles 200, 238 bis et 978 du CGI et à l’article L. 14 A du LPF.

Ces aménagements s’appliqueront à compter du 1er janvier 2024 aux contrôles en cours ainsi qu’à ceux engagés à compter de cette même date.

On notera que cet article de la LF assouplit également les conditions dans lesquelles des agents des finances publiques peuvent être autorisés à exercer leurs missions de façon anonyme par le biais d’un élargissement du mécanisme de la délégation.

Visites domiciliaires (LPF, art. L. 16 B) : Précisions sur le champ d’application et les documents sur support informatique pouvant être saisis (art. 122)

Rappel

Pour mémoire, les agents des finances publiques disposent d’un droit de visite et de saisie pour la recherche des infractions en matière d’impôts directs et de taxes sur le chiffre d’affaires (LPF, art. L. 16 B).

Cette mesure permet à l’Administration de rechercher en tous lieux, même privés, la preuve d’agissements frauduleux lorsqu’il existe des présomptions qu’un contribuable se soustrait à l’établissement ou au paiement de l’impôt sur le revenu ou sur les bénéfices, ou des taxes sur le chiffre d’affaires :

  • En se livrant à des achats ou à des ventes sans facture ;
  • En utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ;
  • Ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures, ou en passant ou faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est prescrite par le CGI.

LF 2024

Il est désormais précisé que le recours aux dispositions de l’article L. 16 B du LPF est également possible, lorsqu’il existe une présomption que le contribuable souscrit des déclarations inexactes en vue de bénéficier de crédits d’impôt prévus au profit des entreprises passibles de l’IR ou de l’IS.

Par ailleurs, la LF tire les conséquences d’une décision du Conseil constitutionnel, dans le cadre de laquelle celui-ci a posé le principe selon lequel les agents de l’Administration peuvent procéder à la saisie des documents accessibles ou disponibles depuis les locaux visités, notamment ceux présents sur un support informatique, quand bien même ces documents sont stockés sur des serveurs informatiques situés dans des lieux distincts (Conseil constitutionnel, décision n°2021-980 QPC du 11 mars 2022).

Il est désormais expressément précisé que les agents de l’Administration pourront accéder aux pièces ou documents présents sur le support informatique « y compris distant ».

En l’absence d’entrée en vigueur spécifique, ces précisions devraient s’appliquer à compter du 1er janvier 2024.

Indemnisation des « aviseurs fiscaux » par l’Administration (art. 123)

Rappel

Le dispositif d’indemnisation pour les personnes révélant des informations aux services fiscaux (« aviseurs fiscaux »), a été institué à l’origine à titre expérimental pour une durée de 2 ans par la LF 2017, puis pérennisé par la loi relative à la lutte contre la fraude.

À l’origine, le recours aux informations transmises par des aviseurs fiscaux était possible pour rechercher des manquements relatifs aux règles applicables en matière de domiciliation fiscale, à la lutte contre la corruption d’agents publics, à la répression de l’évasion fiscale internationale, à l’obligation de déclarer les comptes bancaires, contrats de capitalisation et trusts détenus à l’étranger par des résidents de France, à l’obligation de déclarer les sommes perçues par une personne domiciliée hors de France en rémunération de services rendus par une personne domiciliée en France, etc.

Le champ des manquements susceptibles d’entrer dans ce dispositif a ensuite été étendu par la LF 2020 (art. L. 10-0 AC du LPF) :

  • Le dispositif a été étendu aux renseignements concernant les opérations de fraude à la TVA dans le cadre des transactions nationales et internationales, sans limitation de durée ;
  • Le dispositif a été généralisé pour une durée expérimentale de 2 ans à tout agissement, manquement ou manœuvre susceptible d’être sanctionné en application du c du 1 ou du 5 de l’article 1728, de l’article 1729, de l’article 1729-0 A, du 2 du IV ou du IV bis de l’article 1736, du I de l’article 1737, de l’article 1758 ou de l’article 1766 du CGI, lorsque le montant des droits éludés est supérieur à 100 k€ (e. extension du dispositif au cas de fraudes les « plus significatives » quel que soit le type de manquement, l’impôt et la règle d’assiette concernés). Cette période de 2 ans a ensuite été prorogée par la LF 2022, et devait venir à expiration au 31 décembre 2023.

LF 2024

La partie expérimentale du dispositif serait désormais pérennisée, en étant inscrite à l’article L. 10-0 AC du LPF, sans limitation de durée.

Accès des agents de l’ACPR et de l’AMF au fichier sur les échanges de renseignements sur les comptes financiers (art. 124)

Pour mémoire, les teneurs de compte, les organismes d’assurance et toutes autres institutions financières françaises doivent mentionner sur une déclaration spécifique les informations requises pour l’application de la directive 2011/16/UE (du 15 février 2011 relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal) et des conventions conclues par la France permettant un échange automatique d’informations relatives aux comptes financiers en matière fiscale (CGI, art. 1649 AC, I).

Ces informations peuvent notamment concerner tout revenu de capitaux mobiliers ainsi que les soldes des comptes et la valeur de rachat des bons ou contrats de capitalisation et placements de même nature.

Il revient à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) et à l’Autorité des marchés financiers (AMF) de vérifier auprès des institutions financières la mise en place de contrôles internes permettant d’assurer le respect et la bonne application de ces règles (LFR 2017, n°2017-1775 du 28 décembre 2017, art. 56).

La LF 2024 confère aux agents de l’AMF et de l’ACPR un droit d’accès direct au fichier contenant les informations déclarées par les institutions financières françaises en application de l’article 1649 AC du CGI, pour les besoins de l’accomplissement de leurs missions.

Les agents disposant d’un droit d’accès direct à ces informations seront individuellement désignés et habilités par le secrétaire général de l’AMF et le secrétaire général de l’ACPR.

Versement d’intérêts moratoires en cas de correction spontanée d’une erreur par l’Administration (art. 126)

Rappel

Pour mémoire, en application du premier alinéa de l’article L. 208 du LPF, les contribuables sont en droit d’obtenir le paiement d’intérêts sur les remboursements effectués en raison de dégrèvements d’impôts de toute nature, prononcés par une juridiction ou par l’administration fiscale, à la suite d’une réclamation tendant à la réparation d’une erreur commise dans l’assiette ou le calcul des impositions.

Toutefois, n’ouvrent pas droit au paiement d’intérêts moratoires les dégrèvements d’office prononcés à la seule initiative du service des impôts ou en application de dispositions légales.

LF 2024

Le premier alinéa de l’article L. 208 du LPF est modifié afin d’étendre le versement d’intérêts moratoires aux situations dans lesquelles l’Administration, sans avoir été saisie d’aucune réclamation par le contribuable, aurait procédé d’elle-même à la correction d’une erreur d’imposition qu’elle aurait commise.

En l’absence de précision spécifique, cette version modifiée de l’article L. 208 du LPF entrera en vigueur à compter du 1er janvier 2024.

TVA

Calendrier concernant la réforme de la facturation électronique (art. 82)

La LF 2024 vient préciser le nouveau calendrier d’entrée en vigueur de la réforme relative à la facturation électronique.

Le déploiement interviendra donc en deux étapes (au lieu de trois) :

  • 01/09/2026 : obligation de réception pour toutes les entreprises
  • 01/09/2026 : obligation d’émission pour les grandes entreprises et les ETI (avec un décalage possible d’un trimestre, soit une entrée en vigueur au plus tard au 1er décembre 2026)
  • 01/09/2027 : obligation d’émission pour les PME et les micro-entreprises (avec un décalage possible d’un trimestre, soit une entrée en vigueur au plus tard au 1er décembre 2027)

En principe, les obligations en matière de « e-reporting » devraient suivre le même calendrier.

Mesures dispensant certains assujettis non établis en France et y réalisant des importations de leur obligation d’immatriculation à la TVA (art. 112)

Afin d’adapter la généralisation du mécanisme d’autoliquidation de la TVA due à l’importation à certaines situations particulières rencontrées par les opérateurs non-établis en France, les règles relatives à l’obligation d’immatriculation à la TVA de ces opérateurs évoluent.

En effet, la LF prévoit trois nouveaux cas de dispense d’identification à la TVA pour les assujettis non établis ni identifiés à la TVA en France, et y réalisant exclusivement :

  • Des importations de biens mis en libre pratique ou placés en admission temporaire (en exonération partielle de droits) sur la base d’une déclaration verbale (les types de biens concernés par ces déclarations verbales sont expressément prévus par les articles 135 et 136 du Règlement délégué 2015/2446 de la Commission européenne) ;
  • Des importations de biens destinés à être utilisés ou cédés à titre gratuit dans le cadre de foires, expositions et manifestations ;
  • Des importations de biens ouvrant intégralement droit à déduction, sous réserve que les opérateurs concernés désignent en France un ou plusieurs mandataires (à noter que ce dispositif n’entrera en vigueur qu’à compter du 01/01/2025) qui agiront en leur nom et pour leur compte, dans les conditions prévues par le nouvel article 289 A bis du CGI.

Concernant cette dernière situation, il convient de retenir que le ou les mandataires, solidairement tenus au paiement de la TVA, des intérêts de retard, des majorations et amendes éventuellement dues par les opérateurs étrangers, devront : 

  • Être établis et identifiés à la TVA en France depuis au moins un an ;
  • Remplir les conditions nécessaires à l’accréditation en qualité de représentant pour les besoins de la TVA, telles que prévues par le A du IV de l’article 289 A du CGI ;
  • Être identifiés en tant que mandataire par leur service des impôts ;
  • Se voir confier les biens concernés dans le cadre d’un contrat de vente en consignation, d’ouvraison, de montage, de façon, de location, d’entreposage ou d’un contrat assurant le transit vers un autre territoire, ces modalités devant être prévues dans un mandat écrit précisant également la période concernée ;
  • Déclarer ces opérations distinctement des autres opérations pour lesquelles il est lui-même redevable de la TVA ;
  • S’acquitter de toutes les obligations déclaratives, de paiement, de déduction, de remboursement et de tenue de registre ou d’états relatives aux opérations de son mandant portant sur les biens confiés.

Il convient de noter que la désignation d’un mandataire sera également possible en cas de réalisation d’opérations, à déterminer par décret, portant sur des biens dans le cadre d’échanges avec les territoires tiers et faisant l’objet d’une exonération ouvrant droit à déduction de la TVA, d’une dispense de paiement ou d’une suspension de l’exigibilité. 

Mesures liées aux ventes à distance de biens importés réalisées par des « dropshippers » (art. 112)

La LF 2024 prévoit également des mesures visant à éliminer les contournements par les vendeurs en ligne utilisant le « dropshipping ».

Schéma du régime actuel

En forte croissance ces dernières années, cette pratique commerciale consiste pour un intermédiaire (le « dropshipper ») à proposer, sur son site internet, des produits dont il ne dispose pas physiquement. Une fois que son client passe commande, le « dropshipper » achète le même bien auprès d’un fournisseur, le plus souvent situé hors de l’UE, et demande au fournisseur d’organiser la livraison chez son client.

En pratique, lors de l’introduction du colis en France, les douanes/l’administration fiscale ignorent l’intervention du « dropshipper », seuls sont mentionnés sur le colis l’expéditeur (le fournisseur) et le consommateur final. Le redevable de la TVA à l’importation est le destinataire des biens (le consommateur final).

Le « dropshipper » n’étant légalement pas mentionné comme redevable de la TVA due à l’importation du bien, la vente à distance de biens importés qu’il réalise n’est pas taxable en France (CGI, art. 258 IV). Ainsi, au mieux, les biens sont dédouanés sur la base de la première vente, sans intégrer la marge du « dropshipper » dans la valeur en douane. Autrement dit, la TVA est ainsi acquittée sur le seul prix de vente de l’expéditeur, bien moins élevé que celui payé par le client final.

Nouveau schéma proposé par la LF 2024

 

 

Les aménagements de la LF 2024 ont pour objectif non seulement de mieux protéger le consommateur mais également de permettre à la TVA d’être appliquée sur la base d’un prix incluant la marge du « dropshipper ». Pour ce faire, il sera nécessaire dans ce schéma de désigner le « dropshipper » comme destinataire des biens, en le rendant redevable de la TVA due à l’importation par voie d’autoliquidation.

La revente sera dès lors territorialisée en France et soumise à la TVA sur le prix final.

L’administration fiscale disposera ainsi de nouveaux outils juridiques pour taxer ces ventes à la TVA en France et ainsi valablement poursuivre les opérateurs défaillants dans le cadre de contrôles a posteriori.

Autres mesures

Création d’une taxe « streaming » (art. 53)

La LF 2024 institue une taxe, affectée au Centre National de la musique (CNM), sur les locations en France de phonogrammes ou de vidéomusiques destinés à l’usage privé du public dans le cadre d’une mise à disposition à la demande sur les réseaux en ligne.

En pratique, sera concernée la mise à la disposition du public d’un service offrant, à titre autre qu’accessoire, l’accès à titre onéreux ou à titre gratuit, à des enregistrements phonographiques ou vidéomusicaux, sur demande individuelle formulée par un procédé de communication électronique.

En revanche, la taxe nouvelle ne sera pas applicable au service gratuit dont l’objet principal est d’assurer la fourniture d’informations relatives à des œuvres musicales et leur promotion auprès du public.

Seront redevables de cette taxe les personnes encaissant les sommes sur lesquelles la taxe est assise, qu’elles soient établies en France ou non.

On notera que les contreparties encaissées par une personne autre que le fournisseur qui sont reversées, seront réputées être encaissées par le bénéficiaire de ce reversement.

Lorsque plusieurs personnes sont redevables au titre d’un même service, le montant de la taxe sera établi séparément pour chacune d’elles à partir des seules contreparties qu’elles ont encaissées.

La taxe sera assise sur le montant hors TVA :

  • du prix acquitté par le public à raison des opérations de mise à la disposition d’un service offrant l’accès à des enregistrements musicaux (e. activité de location de phonogrammes ou de vidéomusiques définie ci-dessus) ;
  • des sommes versées par les annonceurs et les parrains pour la diffusion de leurs messages publicitaires sur un service donnant ou permettant l’accès à des enregistrements phonographiques ou vidéomusicaux ou donnant accès gratuitement à des contenus créés par des utilisateurs privés à des fins de partage et d’échange au sein de communautés d’intérêts. Ces sommes seraient retenues à hauteur de 34 % de leur montant.

La taxe sera déterminée, chaque année civile, comme la fraction de la somme de ces montants excédant le seuil de 20 m€. Ce seuil sera apprécié séparément pour chaque service.

Le taux de cette taxe est fixé à 1,2 %.

Son fait générateur interviendra à l’achèvement de l’année civile au cours de laquelle les contreparties ont été encaissées.

Elle est constatée, liquidée, recouvrée et contrôlée selon les mêmes sanctions garanties, sûretés et privilèges que la TVA.

Cette taxe s’applique à compter du 1er janvier 2024.

Prorogation de la CRIM (contribution sur la rente infra-marginale) (art. 80)

Rappel

La LF 2023 a transcrit en droit français l’une des mesures prévues par le Règlement européen 2022/1854 sur une intervention d’urgence pour faire face aux prix élevés de l’énergie, en instaurant une contribution temporaire sur la rente infra-marginale de la production d’énergie (CRIM).

Cette contribution s’applique à toutes les installations de production d’électricité (la LF 2023 ménage cependant un certain nombre d’exclusions).

Elle est due par l’exploitant de l’installation de production.

Le montant de la contribution correspond à la fraction des revenus de marché de l’exploitant de l’installation excédant un seuil forfaitaire par MWh vendu, variable en fonction de la source d’énergie produite (éolien, nucléaire, biomasse etc).

L’assiette ainsi déterminée fait ensuite l’objet d’un abattement de 10 %.

Le fait générateur de cette contribution est la production d’électricité réalisée entre le 1er juillet 2022 et le 31 décembre 2023.

LF 2024

La contribution infra-marginale est prorogée pour la période comprise entre le 1er janvier 2024 et le 31 décembre 2024.

Son montant est sensiblement réduit :

  • D’une part, les différents seuils forfaitaires par MWh en fonction des sources d’énergie produite seront réévalués pour tenir compte de l’inflation anticipée pour 2023, soit 4,8 %.
  • D’autre part, l’abattement pratiqué sur l’assiette est rehaussé rehaussé de 10 % à 50 %.

Mécanisme d’encadrement de l’IFER portant sur les réseaux de télécommunications fixes (art. 81)

Rappel

Pour mémoire, l’article 1635-0 quinquies du CGI prévoit une imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER), instituée au profit des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics de coopération intercommunale.

Cette imposition, qui s’applique à certaines catégories de biens, est actuellement constituée de 10 composantes, dont l’IFER sur les répartiteurs principaux de la boucle locale cuivre et les réseaux de communications électroniques en fibre optique et en câble coaxial.

Cette IFER, dite « IFER fixe », est codifiée à l’article 1599 quater B du CGI. Son redevable est le propriétaire de l’équipement (i.e. répartiteurs principaux, points de mutualisation des réseaux, nœuds de raccordement optique) au 1er janvier de l’année d’imposition.

Le montant de l’imposition est fonction du nombre de lignes en service que l’équipement comporte au 1er janvier de l’année d’imposition, et fait l’objet d’une revalorisation chaque année en fonction de l’évolution prévisionnelle des prix à la consommation des ménages. La LF 2011 a introduit un mécanisme de plancher visant à garantir un montant minimum de recettes pour les régions affectataires.

Le tarif de l’IFER fixe s’élève à 19,04 € par ligne en service au 1er janvier 2023 (BOI-TFP-IFER-90 n°110 du 01.02.2023).

On notera qu’une exonération temporaire de 5 ans a été prévue pour les nouvelles lignes raccordées par un répartiteur principal, un point de mutualisation ou un nœud de raccordement optique, et ce à compter des impositions dues au titre de l’année 2019 (BOI-TFP-IFER-90 n°118 du 01.02.2023). Il convient de distinguer 2 cas de figure : soit la ligne est construite à compter de l’imposition 2019, et dans ce cas, les exercices 2019 à 2023 bénéficient de l’exonération ; soit la ligne a été construite antérieurement à l’imposition 2019, et dans ce cas, les exercices exonérés dépendent de la date de construction ou de mise en service de la ligne :

 

 

Mécanisme d’exonération pour les lignes construites/mises en service avant 2019

LF 2024

Le législateur, anticipant une hausse substantielle du tarif de l’IFER fixe (doublement d’ici 2030), notamment en raison de la transition technologique en cours, et une possible répercussion de ce coût sur le consommateur final, propose la mise en place d’un mécanisme d’ajustement à la baisse du tarif de l’IFER, chaque fois que son produit aura dépassé 400 m€ au cours d’une année (sur le modèle inverse du « plancher » mis en place par la LF 2011).

En cas de dépassement du plafond susmentionné, le tarif de l’IFER fixe applicable au titre de l’année suivante sera minoré par un coefficient égal au quotient de ce montant de 400 m€ par le montant du produit perçu.

A noter que ce plafond de 400 m€ fera l’objet d’une éventuelle revalorisation chaque année, et que cette mesure sera applicable à compter des impositions dues au titre de 2024.

Extension de la TGAP aux déchets radioactifs métalliques (art. 102)

Rappel

La taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) est notamment due par les exploitants des installations de stockage ou de traitement thermique de déchets dangereux ou non dangereux, ainsi que par les personnes qui transfèrent, ou font transférer des déchets vers un autre État (CGI, art. 266 sexies).

Plusieurs exonérations sont toutefois prévues.

Rappelons que la LF 2023 est venue exempter les résidus stockés issus d’un traitement réalisé par une installation qui recycle plus de 70 % de la masse totale des boues, terres et sédiments pollués qu’elle réceptionne et qui émet peu de substances dans l’atmosphère, à la condition que l’installation de stockage des déchets dangereux et l’installation de leur traitement soient implantées sur un même site.

LF 2024

La LF 2024 prévoit l’inclusion dans le champ de la TGAP des déchets radioactifs métalliques.

Par ailleurs, elle réduit les tarifs de la taxe pesant sur les installations nucléaires de base.

Faute d’entrée en vigueur spécifique, la mesure est applicable à compter du 1er janvier 2024.

Création d’une nouvelle taxe incitative relative à la réduction de l’intensité d’émission de gaz à effet de serre dans les transports (art. 105)

La LF 2024 instaure, à compter du 1er janvier 2026, une nouvelle taxe incitative relative à la réduction de l’intensité d’émission de gaz à effet de serre dans les transports qui serait assise sur les émissions résultant de l’utilisation des produits relevant des catégories fiscales des gazoles et essences au sens de l’article L. 312-22 du Code des impositions sur les biens et services (Code des douanes, art. 266 sexdecies nouveau). 

L’objectif de cette taxe est de promouvoir l’utilisation d’énergies moins émettrices de gaz à effet de serre dans les transports (i.e. énergies renouvelables durables, biogaz renouvelable durable, électricité d’origine renouvelable, hydrogène renouvelable/bas carbone durable).

En vertu de ce nouveau dispositif, les personnes mettant à la consommation, en France, les produits très émetteurs de gaz à effet de serre précités seront, chaque année, tenues d’atteindre un pourcentage national cible de réduction de l’intensité d’émission de gaz à effet de serre dans les transports. Pour l’année 2025, cet objectif sera fixé à 5 %.

Ainsi, la taxe sera nulle si la réduction de l’intensité d’émission de gaz à effet de serre est supérieure ou égale au pourcentage national cible fixé pour l’année considérée. A l’inverse, les redevables n’atteignant pas cet objectif de réduction de l’intensité d’émission de gaz à effet de serre, seront tenus de s’acquitter de cette taxe (100 € par tonnes de CO2 non évitées en 2025).

Cette taxe devra être déclarée, liquidée et le cas échéant payée par le redevable en une fois, au plus tard le 10 avril de l’année suivant celle sur la base de laquelle son assiette est déterminée.

Ses modalités d’application devront être fixées par un arrêté.

Suppression de dépenses fiscales inefficientes (art. 110)

Comme chaque année, un certain nombre de mesures fiscales, jugées « inefficientes, obsolètes ou sous-utilisées », seront supprimées.

Il s’agit, quasi exclusivement, de dispositifs venus à échéance depuis longtemps, ou applicables sur une période déterminée et passée (notamment un certain nombre de dispositifs mis en place de manière éphémère durant la crise sanitaire liée au COVID-19).

DMTO sur cessions de participations dans des personnes morales à prépondérance immobilière : Renforcement des obligations déclaratives (art. 119)

Pour mémoire, les cessions de participations dans des personnes morales à prépondérance immobilière (i.e. personnes morales françaises ou étrangères non cotées, dont l’actif brut total est principalement constitué d ‘immeubles ou de droits immobiliers situés en France, ou de participations dans des personnes morales remplissant ces même critères) sont soumises à un droit d’enregistrement dont le taux est fixé à 5 %.

Les cessions de participations réalisées à l’étranger dans des personnes morales à prépondérance immobilière sont également soumises à ce droit d’enregistrement (CGI, art. 718 bis). Ces opérations doivent être constatées dans un délai d’un mois par un acte reçu en la forme authentique par un notaire exerçant en France (CGI, art. 726, I, 2°).

Les cessions de participations dans des personnes morales à prépondérance immobilière, y compris lorsque ces cessions sont réalisées à l’étranger, doivent obligatoirement être soumises à la formalité de l’enregistrement dans le délai d’un mois à compter de la date de l’acte (CGI art. 635, 2, 7° bis). À défaut d’acte, une déclaration spéciale doit être souscrite, dans le mois de la cession, pour les cessions de participations dans des personnes morales à prépondérance immobilière (CGI, art. 639).

La LF 2024 renforce les obligations déclaratives relatives aux cessions de participations dans des personnes morales à prépondérance immobilière en matière de DMTO.

Ainsi, les actes et déclarations ayant pour objet de telles cessions (que celles-ci soient réalisées en France ou à l’étranger) devront expressément indiquer si :

  • La personne morale à prépondérance immobilière dont les participations sont cédées est une société immobilière d’attribution « transparente » (CGI, art. 1655 ter) ;
  • Les participations cédées confèrent au cessionnaire, direct ou indirect, le droit à la jouissance d’immeubles ou de fractions d’immeubles au sens de l’article 728 du CGI ;
  • Le cessionnaire a acquitté directement ou indirectement ou s’engage à acquitter des dettes contractées auprès du cédant par cette personne morale (précision du montant de ces dettes, le cas échéant).

Selon l’exposé des motifs, l’idée est de permettre à l’Administration de s’assurer que l’opération de cession ne porte pas sur des droits conférant, en réalité, la jouissance d’un bien immobilier. 

Hausse du taux du versement mobilité pour les entreprises situées en Ile-de-France (art. 139)

Pour mémoire, les entreprises disposant d’au moins 11 salariés, situées à Paris, dans les communes des départements des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, sont assujetties au versement mobilité au taux de 2,95 % sur les revenus d’activité pris en compte pour la détermination de l’assiette des cotisations patronales d’assurance maladie (CGCT, art. L. 2531-4).

Ce taux sera porté à 3,20 % à compter du 1er février 2024 (date d’entrée en vigueur indiqué par Ile-de-France Mobilités via un communiqué de presse du 30 décembre 2023).

Prolongation temporaire du bouclier tarifaire sur l’électricité et modification des conditions d’établissement des tarifs réglementés de vente de l’électricité (art. 225)

La LF prévoit le maintien en 2024 du bouclier tarifaire pour l’électricité mis en place depuis février 2022. Il prévoit également que les fournisseurs seront compensés par l’Etat des pertes qui résultent pour eux de la limitation de la hausse des prix de vente de l’électricité auprès de leurs clients, au titre des charges de service public compensées pour l’année 2024 – mais ils seront tenus de répercuter à leurs clients les montants de la compensation versée par l’Etat.

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Alice de Massiac

Alice a développé depuis plus de 20 ans une large expertise en accompagnant de grands groupes en France et à l’international, tant en conseil qu’en contentieux, anticipant les impacts dans […]

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Clara Maignan

Clara Maignan, avocat, a rejoint les équipes de Deloitte Société d’Avocats en 2011. Elle exerce au sein du Comité Scientifique Fiscal.

Agathe Saint Joanis

Agathe Saint Joanis a intégré Deloitte Société d’Avocats en 2019. Elle y a rejoint l’équipe du Comité Scientifique Fiscal.