L’Assemblée nationale vient d’adopter, en première lecture, les articles fiscaux de la première partie du projet de loi de finances pour 2013. Si certaines mesures ont été adoptées telles qu’elles étaient annoncées dans le projet initial (News du 1er octobre), d’autres ont fait l’objet d’importants amendements.
Fiscalité des entreprises
Limitation de la déduction des intérêts d’emprunt (art. 15)
L’article 15 du PLF assimilait les contrats de crédit-bail et de location de plus de trois mois à un emprunt pour la partie du loyer excédant l’amortissement des biens pris en crédit-bail ou loués, sans plus de précision sur la nature des contrats.
Le Gouvernement a fait adopter un amendement qui précise le champ des contrats de location concernés par la mesure. Il s’agirait des contrats de crédit-bail, de location avec option d’achat ou de location entre sociétés liées au sens du 12 de l’article 39 du CGI.
Ainsi, les locations simples avec des tiers ne seraient pas prises en compte pour la détermination du montant des charges nettes. Mais attention, les locations entre sociétés liées resteraient dans le champ du dispositif.
Prorogation de la contribution exceptionnelle d’IS de 5 % (art. 18 quinquies)
La contribution exceptionnelle d’IS de 5 % instaurée par la 4e LFR 2011 qui avait vocation à s’appliquer jusqu’aux exercices clos au 30 décembre 2013 serait prorogée jusqu’au 30 décembre 2015 (prorogation aux exercices 2013 et 2014 pour les sociétés dont l’exercice social coïncide avec l’année civile).
Mesures adoptées sans modifications marquantes
- Quote-part de frais et charges sur les plus-values de cession de participations (art. 14)
- Limitation des reports déficitaires (art. 16)
- Taxation des sommes placées en réserve de capitalisation (art. 17)
- Revalorisation du dernier acompte d’IS des grandes entreprises (art. 18)
Fiscalité des personnes
Imposition au barème progressif de l’IR des intérêts et dividendes (art. 5)
Le seuil de revenu fiscal de référence en dessous duquel les contribuables pourraient être dispensés du paiement d’un acompte de 24 % serait modulé :
- pour les dividendes : 50 000 € pour les contribuables célibataires, divorcés ou veufs et 75 000 € pour ceux qui sont soumis à une imposition commune ;
- pour les intérêts : 25 000 € pour les contribuables célibataires, divorcés ou veufs et 50 000 € pour ceux qui sont soumis à une imposition commune.
Imposition au barème progressif de l’IR des plus-values mobilières (art. 6)
L’imposition au barème progressif de l’impôt sur le revenu serait maintenue mais sensiblement aménagée.
Tout d’abord, elle n’entrerait en vigueur qu’à partir du 1er janvier 2013. Si les plus-values réalisées en 2012 conserveraient ainsi le bénéfice d’une taxation forfaitaire, le taux de celle-ci serait néanmoins revalorisé à 24 %.
Contrairement au projet initial, le régime actuel des parts ou actions à rendement subordonné des gestionnaires de fonds d’investissement (« carried interest ») serait maintenu, étant rappelé que les plus-values mobilières seraient imposées au barème de l’impôt sur le revenu.
Abattement pour durée de détention
Le mécanisme d’abattement en fonction de la durée de détention des actions ou parts sociales cédées serait simplifié et accéléré :
- 20 % lorsque la durée de détention est d’au moins 2 ans mais de moins de 4 ans ;
- 30 % lorsque la durée de détention est d’au moins 4 ans mais de moins de 6 ans ;
- 40 % à partir de 6 années de détention.
- Contrairement au dispositif initialement proposé par le Gouvernement, s’agissant des titres acquis ou souscrits avant le 1er janvier 2013, la durée de détention serait décomptée à partir de la date effective d’acquisition ou de souscription, et non plus à partir du 1er janvier 2013.
Exonération sous condition de réinvestissement
Le dispositif de report d’imposition sous condition de réinvestissement qui conduit à une exonération définitive après 5 ans serait aménagé pour les cessions réalisées à compter du 1er janvier 2013 :
- le cédant devrait prendre l’engagement d’investir au moins 50 % du montant de la plus-value, net des prélèvements sociaux, et non plus 80 %. En outre, il serait désormais expressément prévu par la loi que cet investissement peut être réalisé dans une ou plusieurs sociétés ;
- le réinvestissement requis, même s’il est de moindre importance, devrait désormais être réalisé dans un délai de 24 mois et non plus de 36 mois ;
- le contribuable devrait réinvestir 100 % du montant de sa plus-value, net des prélèvements sociaux, s’il ne veut pas perdre une partie de son report d’imposition et s’exposer au paiement de l’impôt correspondant assorti, au surplus, d’intérêts de retard.
Mesures en faveur des entrepreneurs
Sur option, le contribuable pourrait soumettre la plus-value de cession des titres de leur entreprise au taux forfaitaire de 19 % lorsque les conditions suivantes sont remplies :
- la société dont les titres ou droits sont cédés exerce une activité professionnelle, à l’exclusion des activités procurant des revenus garantis en raison de l’existence d’un tarif réglementé de rachat de la production, des activités financières, des activités de gestion de patrimoine mobilier (CGI, art. 885 O quater) et des activités immobilières. Cette condition s’apprécierait de manière continue pendant les dix années précédant la cession ;
- les titres ont été détenus par le cédant, directement ou par personne interposée ou par l’intermédiaire du conjoint, de leurs ascendants et descendants ou de leurs frères et sœurs, de manière continue au cours des cinq années précédant la cession ;
- les titres représentent, de manière continue pendant au moins deux ans au cours des dix années précédant la cession, au moins 10 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société dont les titres ou droits sont cédés et au moins 2 % à la date de la cession ;
- le contribuable a exercé au sein de la société dont les titres sont cédés, de manière continue au cours des cinq années précédant la cession, une fonction dirigeante ou une activité salariée.
On retiendra que ce régime de taxation à 19 % des plus-values pourrait s’appliquer dès les cessions réalisées en 2012 pour autant que les conditions soient déjà remplies.
Imposition au barème progressif de l’IR des gains de levée d’options sur actions et d’attribution d’actions gratuites (art. 7)
Le projet initial a été très sensiblement assoupli, notamment par un amendement du Gouvernement. Il affecte différemment les plans en cours et ceux attribués depuis le 28 septembre 2012. En voici les grandes lignes.
Le nouveau régime fiscal et social des gains d’acquisition de stock-options et d’AGA ne serait applicable qu’aux gains afférents à des options sur titres ou des actions gratuites attribuées à compter du 28 septembre 2012 (date de la présentation du PLF 2013 en Conseil des ministres).
Régime fiscal
Plans qualifiés attribués avant le 28 septembre 2012
Les plus-values ou gains d’acquisition afférents à des attributions antérieures au 28 septembre 2012 continueraient de bénéficier de l’option pour les taux forfaitaires actuels (allant de 18 % à 41 % hors prélèvements sociaux, sous réserve du respect des conditions prévues).
Par ailleurs, on retiendra que ces gains ne seraient inclus dans l’assiette de la contribution exceptionnelle sur les très hauts revenus d’activité de 18 % que s’ils proviennent d’options attribuées avant le 16 octobre 2007, c’est-à-dire s’ils ne donnent pas prise à la contribution salariale de 10 % (CSS, art. L137-14).
Les plus-values de cession seraient, quant à elles, traitées comme des plus-values mobilières de droit commun, c’est-à-dire qu’à compter du 1er janvier 2013, elles seraient soumises au barème progressif de l’IR avec application éventuelle des abattements pour durée de détention (20 % entre 2 et 4 ans, 30 % entre 4 et 6 ans, 40 % à partir de 6 ans). On retiendra que pour les opérations dénouées en 2012, les plus-values de cession seraient taxées au taux forfaitaire de 24 %.
Plans qualifiés attribués à compter du 28 septembre 2012
Les plus-values ou gains d’acquisition seraient soumis au barème progressif de l’IR, selon les règles de droit commun des traitements et salaires (le système du quotient automatique du texte initial ne serait finalement pas retenu). L’option pour les taux forfaitaires spécifiques serait supprimée.
La possibilité d’imputer l’éventuelle moins-value de cession de titres issus d’options ou d’actions acquises gratuitement sur les gains de levée ou d’acquisition serait maintenue contrairement au projet initial.
Dès lors que par définition ces gains donnent prise à la contribution salariale, ils seraient exclus de l’assiette de la contribution exceptionnelle sur les très hauts revenus d’activité.
Régime social
Plans qualifiés attribués avant le 28 septembre 2012
Le régime social ne serait pas modifié :
- sous certaines conditions d’indisponibilité, pas de cotisations de sécurité sociale ;
- contribution salariale de 10 % (plans attribués à partir du 16 octobre 2007) ;
- prélèvements sociaux (CSG, CRDS) : 15,5 %.
Plans qualifiés attribués à compter du 28 septembre 2012
Les gains de levées d’options ou d’acquisition d’actions seraient expressément exclus de l’assiette des cotisations de sécurité sociale de droit commun. Ils seraient soumis :
- A la CSG/CRDS sur les revenus d’activité au taux de 8 %, dont 5,1% déductible du revenu au titre duquel elle est prélevée (au lieu de la CSG sur les revenus du patrimoine qui conduit actuellement à un taux global de prélèvements sociaux de 15,5%) ;
- A la cotisation salariale (CSS, art. L 137-14) au taux de 17,5 % (au lieu de 10 % aujourd’hui – la hausse de 7,5 points compensant la diminution d’égal montant du taux de la CSG) sous réserve du respect :
- Pour les stock-options, d’une période d’indisponibilité de 4 ans, décomptée de la date d’attribution des options,
- S’agissant des AGA, d’une période d’indisponibilité de 2 ans à compter de la date d’attribution définitive.
A défaut, le taux de la cotisation salariale serait porté à 22,5 %.
Par ailleurs, les « carried interest » seraient expressément exclus de la dite contribution.
Mesures nouvelles
Plafonnement de la déduction forfaitaire de 10 % pour frais professionnels (art. 4 bis)
Le plafond d’avantage procuré par la déduction forfaitaire de 10 % des frais professionnels, actuellement fixé à 14 157 €, serait ramené à 12 000 €.
Plafonnement des dons consentis à des partis politiques (art. 4 quinquies)
Pour la réduction d’impôt sur le revenu de 66 % du montant versé, dans la limite de 20 % du revenu imposable, le plafond légal de 7 500 € s’appliquerait désormais de manière globale et non plus par parti politique, étant précisé que dans le cas où une fraction de ces sommes correspond à des cotisations, le montant total des dons et des cotisations versés serait retenu dans la limite de 15 000 €.
Mesures adoptées sans modifications marquantes
- Création d’une tranche supplémentaire d’impôt sur le revenu à 45 % (art. 3)
- Plafonnement à 2 000 € de l’effet du quotient familial (art. 4)
- Contribution exceptionnelle sur les revenus d’activité supérieurs à 1 M€ (art. 8)
- ISF (art. 9)
- Aménagement du régime d’imposition des plus-values de cession de terrains à bâtir (art. 10)
- Renforcement de la taxe sur les logements vacants (art. 11)