Le remboursement, par le commettant, à son commissionnaire d’une imposition dont ce dernier s’est acquitté, ne présente pas le caractère d’une indemnité non imposable, mais d’un élément de rémunération taxable.
L’histoire
La société Baxter SAS exerçait, en tant que commissionnaire d’une société suisse, la promotion et la distribution de produits pharmaceutiques fabriqués par cette dernière.
Elle a acquitté, au titre des exercices 2008 à 2013, la contribution due par les exploitants de spécialités pharmaceutiques (remplacée, depuis le 1er janvier 2014, par une nouvelle contribution sur le chiffre d’affaires des entreprises exploitant des spécialités pharmaceutiques, CSS, art. L. 245-6).
En application du contrat de commissionnaire, la société commettante lui remboursait annuellement cette contribution.
La société commissionnaire a considéré que ces remboursements étaient constitutifs d’une indemnité, non imposable, qualification remise en cause par l’Administration.
Devant le Conseil d’État, la société contestait (i) la constitutionnalité de la contribution elle-même et (ii) la qualification des sommes perçues à titre de remboursement retenue par l’Administration.
La décision
Sur la constitutionnalité de la contribution
Pour la requérante, la contribution, en ce qu’elle frappait les entreprises assurant en France l’exploitation d’une spécialité pharmaceutique, sans distinguer si elles disposaient ou non du chiffre d’affaires réalisé in fine, était contraire à l’exigence de prise en charge des facultés contributives (résultant du principe d’égalité devant les charges publiques garanti par l’article 13 de la DDHC).
Le Conseil d’État, se référant aux dispositions du Code de commerce, relève qu’il résulte de la qualité de commissionnaire qu’il réalise lui-même le chiffre d’affaires retiré de la vente des biens du commettant, dont les résultats sont enregistrés dans sa comptabilité.
Aussi, alors même que pèse sur lui l’obligation contractuelle de reverser au commettant le produit de ses ventes, le commissionnaire ne saurait être regardé, pour l’application de la contribution litigieuse, comme n’ayant pas la disposition des ressources qu’il retire de son exploitation et qui constituent son chiffre d’affaires.
Le Conseil d’État considère dès lors la QPC soulevée par la société comme dépourvue de caractère sérieux.
Sur la qualification des sommes reçues en remboursement de la contribution
Le Conseil d’État rappelle d’abord le principe, bien établi, selon lequel les indemnités reçues par un contribuable pour compenser une diminution de ses valeurs d’actif, une dépense exposée ou une perte subie, dès lors que leur versement a été effectué en vertu d’une obligation de réparation incombant à la partie versante, ne constituent des recettes imposables que si la perte ou la charge qu’elles compensent est elle-même déductible pour la détermination du bénéfice imposable (voir en ce sens CE, 12 mars 1982, n°17074, BOI-BIC-PDSTK-10-30-20-20160302 § 190).
Pour le dire plus simplement, lorsque l’indemnité a pour objet de compenser une charge fiscalement non déductible du résultat imposable de la bénéficiaire de l’indemnité, elle ne constitue pas un produit imposable.
La contribution litigieuse étant non déductible de l’IS, il était donc permis de penser que son remboursement ne serait pas constitutif d’un produit imposable.
Toutefois, le Conseil d’État considère que ce remboursement ne présentait pas la nature d’une indemnité, en l’absence de préjudice et d’obligation de réparation en découlant.
Il souligne à cet égard, que dès lors que le commissionnaire était bien, légalement, le redevable de la contribution litigieuse, son paiement ne pouvait être assimilé à un préjudice, de sorte que son remboursement par la société commettante ne découlait pas d’une obligation de réparation.
Procédant ensuite à l’examen du contrat de commissionnaire, il juge que le remboursement de la contribution constituait, en réalité, un élément de rémunération, s’ajoutant à la commission de commissionnaire, et imposable à ce titre.