De nouvelles exonérations de TVA applicables, rétroactivement, à compter du 1er janvier 2021 ?

La Commission européenne a publié le 12 avril 2021 une proposition de directive en vue de l’instauration de deux nouvelles exonérations de TVA spécifiques. Ces exonérations auraient vocation à s’appliquer aux importations de biens et aux achats de biens et services réalisés par la Commission européenne ou autres agences ou organismes institués par le droit de l’Union dans le cadre de l’accomplissement d’un mandat qui leur a été conféré par le droit de l’Union dans l’intérêt général.

Quelles sont les mesures d’exonération prévues par cette proposition de directive ?

Cette proposition de directive s’inscrit dans le cadre de l’actuelle pandémie de COVID-19 et vise à tirer les enseignements de cette dernière en vue de simplifier la gestion des futures crises ou catastrophes éventuelles.

Elle viendrait ainsi modifier la Directive TVA 2006/112/CE, en instaurant deux nouvelles dispositions :

La première, prévoyant l’exonération de TVA des importations de biens réalisées par la Commission européenne, par une agence ou un organisme établi en vertu du droit de l’Union lorsque ces derniers acquièrent ces biens ou services dans le cadre de l’accomplissement d’un mandat qui lui est conféré par le droit de l’Union dans l’intérêt général (nouveau paragraphe f ter) du 1 de l’article 143 de la Directive 2006/112/CE, relative aux « Exonérations à l’importation »).

La seconde, prévoyant l’exonération de TVA, contre remise d’une attestation sous format électronique par le destinataire (attestation dont les modalités restent à définir), des livraisons de biens ou de services à la Commission européenne, à une agence ou à un organisme institué en vertu du droit de l’Union lorsque ces derniers acquièrent ces biens ou services dans le cadre de l’accomplissement d’un mandat qui leur est conféré par le droit de l’Union dans l’intérêt général (nouveau paragraphe a ter) du 1 de l’article 151 de la Directive 2006/112/CE, relatif « Exonérations concernant certaines opérations assimilées aux exportations »).

Quels sont les biens et services concernés ?

Il convient de noter que ces mesures d’exonération ont vocation à s’appliquer à tous types de biens et services, dès lors qu’ils sont acquis par la Commission européenne ou tout autre agence ou organisme institué par le droit de l’Union, dans le cadre du mandat qui leur a été conféré dans l’intérêt général, les autorisant à distribuer / fournir ces biens et services gratuitement aux Etats membres ou à leurs émanations, dans le cadre de la gestion (prévention, préparation et réaction) des situations (présentes ou futures) d’urgence (naturelle ou sanitaire).

En effet, la proposition de directive ne prévoit, ni aucune liste de biens et services auxquels ces exonérations auraient vocation à s’appliquer, ni aucune liste d’exceptions à ces exonérations.

La Commission, dans son exposé préalable, donne des exemples de biens et services auxquels ces exonérations pourraient s’appliquer :

  • Le matériel biologique, tels les vaccins, les produits sanguins ou les anticorps 
  • Les équipements médicaux, tels les tests de diagnostic et le matériel de test, l’équipement de laboratoire, l’équipement de protection individuelle (gants, respirateurs / masques, blouses, produits et équipements de désinfection) 
  • Des articles non médicaux nécessaires pour faire face aux crises humanitaires, tels les tentes, les lits de camp, les vêtements et la nourriture, les équipements de recherche et de sauvetage pour les régions sismiques, les sacs de sable, les gilets de sauvetage et bateaux gonflables pour les régions inondables, les appareils de mesure du rayonnement pour les accidents nucléaires 
  • Des services avec ou sans lien avec le secteur de la santé, tels que le développement, la production et l’achat des produits nécessaires, la recherche et l’innovation, les activités d’approvisionnement conjointes, le stockage stratégique des produits, les licences pharmaceutiques, l’application de la thérapeutique, l’accueil de patients, les échange de professionnels de la santé ou d’autres experts, la mise à disposition d’installations de quarantaine, les essais cliniques, la validation scientifique des produits médicaux, la désinfection de locaux

Quels sont les objectifs poursuivis par ces dispositions ?

Ces exonérations poursuivent deux objectifs affichés :

  • Eviter que le budget accordé à la Commission européenne ou à ces agences et organismes pour la gestion des périodes de crise ne soit amputé de la TVA grevant leurs achats et, éviter, ainsi, que la TVA ne vienne réduire le volume de biens et services pouvant être acheté avec ce budget 
  • Réduire, pour les entreprises livrant ces biens et services, les coûts liés à la compliance dans les Etats membre concernés.

Quelle est la prochaine étape ?

Cette proposition de Directive va être soumise au Parlement européen pour avis, et au Conseil pour adoption.

Il convient toutefois de noter, dès à présent, que cette proposition de directive prévoit la transposition de ces mesures par les Etats membres au plus tard le 30 avril 2021, ce qui laisse très peu de temps aux Etats membres pour se retourner.

Quels sont les points d’attention ?

La proposition de directive prévoit une application rétroactive de ces nouvelles mesures au 1er janvier 2021, ce qui pose, en pratique, la question de la gestion de la TVA qui aurait déjà été facturée et collectée par les entreprises préalablement à la transposition de cette nouvelle directive par les Etats membres.

Enfin, nous noterons que la proposition de directive ne précise pas dans quelle mesure ces nouvelles exonérations s’accompagneront, ou non, d’un droit à déduction de la TVA payée au stade antérieur par l’entreprise (précision qui avait pu être apportée lors de l’instauration d’autres dispositifs d’exonérations de TVA de le cadre de la pandémie de COVID -19, notamment dans la directive (UE) 2020/2020 du Conseil du 7 décembre 2020, modifiant la directive 2006/112/CE en ce qui concerne des mesures temporaires relatives à la taxe sur la valeur ajoutée applicable aux vaccins contre la COVID-19 et aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro de cette maladie en réaction à la pandémie de COVID-19).

Où trouver la proposition de directive ?

La proposition est actuellement disponible en anglais sur le site web de la Commission européenne.

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Vanessa Irigoyen

Vanessa, Avocat Associée, possède plus de 16 ans d’expérience en fiscalité indirecte. Elle travaille avec des clients français et internationaux dans divers secteurs, notamment : pharmaceutique, e-business, aérospatial et défense, […]

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Mélinda Coraboeuf

Avocat Directrice au sein du Groupe Fiscalité Indirecte du cabinet Deloitte Société d’Avocats. Mélinda Coraboeuf dispose d’une expérience professionnelle de 8 ans en fiscalité indirecte et plus précisément en matière […]