Appréciation du ratio de couverture d’intérêts pour l’application de l’ancien dispositif de sous-capitalisation (pré-ATAD1)

Selon la CAA de Paris, l’abandon de créance obtenu par une société constitue, pour cette dernière, un produit exceptionnel dont il ne peut être tenu compte pour la détermination du résultat courant avant impôts servant au calcul du ratio de couverture d’intérêts pour l’application de l’ancien dispositif de sous-capitalisation.

Rappel

Avant d’être profondément amendé à l’occasion de la transposition en droit français des règles « ATAD 1 » (LF 2019, art. 34, application aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019), le dispositif de lutte contre la sous-capitalisation (CGI, art. 212, II ancien) limitant la déduction des intérêts entre sociétés liées s’appliquait lorsque 3 ratios différents étaient dépassés (ratio d’endettement, ratio de couverture d’intérêts et ratio d’intérêts servis à des entreprises liées).

L’histoire

Au cours de l’exercice 2012, une société a déduit de son résultat l’intégralité des intérêts versés à sa société mère dans le cadre d’une convention de trésorerie.

L’Administration a remis en cause cette déduction, estimant que la société emprunteuse se trouvait dans une situation de sous-capitalisation.

Les débats se cristallisaient autour des modalités d’appréciation du ratio de couverture d’intérêts, considéré comme dépassé lorsque le montant des intérêts servis par une entreprise à des entreprises liées excède 25 % de son résultat courant avant impôts, majoré desdits intérêts, des amortissements déduits et de la quote-part de loyer de crédit-bail prise en compte pour la détermination du prix de cession du bien à l’issue du contrat.

Dans ses commentaires au BOFiP, l’Administration indiquait que le résultat courant avant impôt s’entendait du solde intermédiaire de gestion du même nom déterminé dans les conditions prévues par l’article 532-7 du PCG (devenu l’article 842-1 du PCG – BOI-IS-BASE-35-20-30-10, n°140, 29 mars 2013).

Au cas d’espèce, la société estimait qu’il devait être tenu compte, pour la détermination de ce résultat courant avant impôts, de l’abandon de créance que lui avait consenti sa société mère au titre du même exercice, présentant, selon elle, la nature d’un produit financier.

L’Administration considérait, au contraire, qu’il s’agissait d’un produit exceptionnel ne pouvant être pris en compte pour l’appréciation du résultat courant avant impôts.

La décision de la CAA de Paris

La Cour confirme le redressement et juge à son tour que l’abandon de créance litigieux ne pouvait être regardé comme un produit résultant de l’activité normale et courante de l’entreprise (par référence à la définition posée par l’article R. 123-192 du Code de Commerce) et présentait donc nécessairement un caractère exceptionnel.

Elle juge qu’il importe peu, à cet égard, que l’actionnaire de la société aurait consenti d’autres aides de cette nature aux entreprises dont elle finance le développement.

Elle confirme donc sa non-prise en compte pour la détermination du résultat courant avant impôts aux fins de calcul de ratio de couverture d’intérêts, ce dont il résulte que la société se trouvait bien en situation de sous-capitalisation.

On notera que si la société tentait également de faire valoir que l’abandon de créance constituerait une subvention d’exploitation devant être comptabilisée en compte de produits courants, elle n’apportait aucun justificatif au soutien de cet argument.

Portée de la décision

La solution ne présente plus aujourd’hui qu’un caractère contentieux, dès lors que désormais, le seul dépassement du ratio d’endettement suffit à caractériser une situation de sous-capitalisation. En outre, le mécanisme général de limitation des charges financières est déterminé en fonction de l’Ebitda fiscal – sans référence au résultat courant avant impôts.

On rappellera enfin que le règlement n°2022-06 modifiant le règlement ANC n°2014-03 du 5 juin 2014 relatif au PCG comporte une nouvelle définition du résultat exceptionnel, bien plus restrictive, puisqu’elle ne vise que les produits et charges directement liés à un événement majeur et inhabituel (entrée en vigueur prévue pour le 1er janvier 2025).

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Alice de Massiac

Alice a développé depuis plus de 20 ans une large expertise en accompagnant de grands groupes en France et à l’international, tant en conseil qu’en contentieux, anticipant les impacts dans […]

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Clara Maignan

Clara Maignan, avocat, a rejoint les équipes de Deloitte Société d’Avocats en 2011. Elle exerce au sein du Comité Scientifique Fiscal.