Un nouvel encadrement des annonces de réduction de prix pour lutter contre les pratiques commerciales trompeuses

Un nouvel encadrement des annonces de réduction de prix a été introduit en droit français avec la transposition de la directive européenne 2019/2161 du 27 novembre 2019 par l’Ordonnance 2021-1734 du 22 décembre 2021. Cette directive dite « Omnibus » est relative à une meilleure application et une modernisation des règles de l’Union en matière de protection des consommateurs. Sa transposition en droit interne ajoute l’article L 112-1-1 dans le Code de la consommation, dont les dispositions, entrées en vigueur le 28 mai 2022, renforcent l’encadrement des annonces de réduction de prix faites par les professionnels à destination des consommateurs. Très favorable aux consommateurs, cet article renforce la lutte contre les pratiques commerciales trompeuses. 

La nouvelle réglementation

La nouvelle réglementation impose le respect de certaines lignes directrices par les professionnels en cas d’annonce de réduction de prix à destination des consommateurs. En premier lieu, toute annonce d’une réduction de prix doit mentionner le prix antérieur pratiqué par le professionnel avant l’application de la réduction de prix. En vertu de l’article précité, le prix antérieur fait référence au « prix le plus bas pratiqué par le professionnel à l’égard de tous les consommateurs au cours des trente derniers jours précédant l’application de la réduction de prix » (Article L.112-1-1. I, al. 2, du Code de la consommation).

Certaines modalités doivent être respectées en matière de détermination du prix antérieur. Ainsi, le professionnel a le droit de prolonger une réduction de prix, mais il doit alors informer le consommateur de cette prolongation. Toutefois, une pratique commerciale trompeuse peut être caractérisée si un professionnel propose un prix réduit sur une période excessivement longue par rapport à la période pendant laquelle le prix antérieur a été pratiqué : il ne s’agit plus dans ce cas d’une réduction de prix, mais du prix lui-même ! Par ailleurs, l’annonce de réduction de prix doit exclusivement concerner un bien que le professionnel « a précédemment proposé à la vente » (MEDEF, FAQ concernant les conditions d’application de l’article L.112-1-1 du Code de la consommation, p.4, 31 mai 2022)

Un champ d’application large

Le nouveau cadre législatif s’applique aux offres commerciales proposées par le professionnel en magasin, sur un site de vente en ligne ou dans un catalogue (sans autre précision dans le texte, on en déduit que sont visés tous les catalogues, quel qu’en soit le support matériel).

En outre, ces nouvelles dispositions concernent les professionnels établis en France ou ailleurs dans l’Union européenne, mais également ceux établis en dehors de l’Union européenne mais dirigeant leur activité vers le marché français (MEDEF, FAQ concernant les conditions d’application de l’article L.112-1-1 du Code de la consommation, p.3, 31 mai 2022).

Il faut ajouter que les réductions de prix concernées visent la clientèle courante et non celles qui seraient réservées à certains consommateurs. Ainsi, le prix est proposé à l’intention de tous les consommateurs sans exception et ne requiert pas de ces derniers de remplir certaines conditions pour bénéficier de la réduction.

Une marge de manœuvre résiduelle pour le professionnel

Malgré les restrictions imposées au professionnel, ce dernier conserve une certaine liberté concernant la forme de l’affichage de la réduction de prix qui est laissée à sa libre appréciation. Il peut ainsi afficher la réduction de prix en valeur absolue, en pourcentage ou par un prix barré.

L’article précité dispose qu’« en cas de réductions de prix successives pendant une période déterminée, le prix antérieur est celui pratiqué avant l’application de la première réduction de prix » (Article L.112-1-1. I, al. 3, du Code de la consommation). A titre d’exemple, au cours d’une opération de promotion (période de soldes ou de liquidation), il est possible de conserver le même prix antérieur qui servira de référence. Le professionnel doit cependant être vigilant, car une telle pratique ne doit pas être déloyale.

Les exceptions au (nouveau) principe général

Deux exceptions sont prévues. D’une part, les annonces de réduction de prix portant sur des produits périssables menacés d’une altération rapide sont exclues de la réglementation prévue aux alinéas 1 à 3 du I de l’article précité. Cette exclusion concerne certains produits particuliers qui font l’objet de remises en raison de la courte durée de leur date de péremption (MEDEF, FAQ concernant les conditions d’application de l’article L.112-1-1 du Code de la consommation, p.6, 31 mai 2022).

D’autre part, les « opérations par lesquelles un professionnel compare les prix qu’il affiche avec ceux d’autres professionnels » (Article L.112-1-1. II du Code de la consommation) sont également exclues de la nouvelle réglementation.

De la pédagogie… et de lourdes sanctions

Pour assister les entreprises dans la mise en œuvre de la nouvelle réglementation, le MEDEF et la DGCCRF ont publié, à la suite d’un travail mené de manière concertée, le 31 mai dernier, une FAQ.

La DGCCRF précise qu’en 2022, pour tenir compte de la nécessité d’anticipation de ces nouvelles mesures par les entreprises, elle privilégiera les suites pédagogiques pouvant donner lieu à un avertissement adressé au professionnel pour l’informer du constat d’un manquement ou de l’infraction résultant soit d’une méconnaissance des nouvelles dispositions, soit d’une négligence dans leur application. Au-delà de cette période, le non-respect de ces règles pourra constituer une pratique commerciale trompeuse qui sera alors punie de 2 ans d’emprisonnement et 300 000 € d’amende.

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Muriel Féraud-Courtin

Muriel Féraud-Courtin, Avocat Associée, a acquis une expérience de plus de 25 ans en droit des affaires et travaille en étroite coopération avec les avocats du réseau international Deloitte Legal. […]

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Philippe Lorant

Philippe Lorant, Avocat Directeur, exerce son activité au sein de l’équipe droit des affaires. Il intervient en droit commercial pour la conception et la négociation de contrats complexes (joint-ventures, consortiums, […]