Régime « IP box » : possible option dans le délai de réclamation ?

Le TA de Lyon juge, de manière inédite à notre connaissance, que l’option pour le régime « IP box » (CGI, art. 238) peut être effectuée jusqu’à l’expiration du délai de réclamation prévu à l’article R. 196-1 du LPF.

Rappel

En application du régime dit « IP box », les produits de cession ou de concession de certains actifs incorporels (brevets, certificats d’obtention végétale, certains logiciels, etc.) peuvent, sous réserve du respect d’un certain nombre de conditions, et sur option, faire l’objet d’une imposition séparée au taux de 10 % (CGI, art. 238, dans sa rédaction issue de la LF 2019).

L’option pour l’application de ce régime doit être formulée pour chaque actif, bien ou service (option pour un produit) ou pour chaque famille de biens ou services (option pour une famille de produits), dans la déclaration de résultat de l’exercice au titre duquel elle est exercée (CGI, art. 238, V).

Elle est matérialisée par la souscription d’une annexe jointe à la déclaration de résultat (formulaire n°2468-SD), laquelle doit détailler, pour chaque actif, bien ou service ou famille de biens ou services, les calculs réalisés pour la détermination du résultat net de cession, de concession ou de sous-concession, et la détermination du rapport d’assujettissement au taux réduit d’imposition.

Dans ses commentaires au BOFiP, l’Administration indique que le non-respect de cette obligation déclarative constitue une cause de déchéance de l’option pour le régime « IP box » pour chaque actif, bien ou service ou famille de biens ou services concerné (BOI-BIC-BASE-110-20, 3 mai 2023, n°160).

L’histoire

Une société a conçu un progiciel dont elle tire des revenus via sa concession.

Elle a sollicité le bénéfice du régime « IP box » au titre de ces revenus, pour les exercices 2020 et 2021, via une réclamation effectuée en 2022.

L’Administration a refusé de faire droit à cette demande, avant que le litige ne soit porté devant les juridictions.

La décision du TA de Lyon

Le TA de Lyon rappelle d’abord, par application d’une jurisprudence bien établie, que les dispositions qui prévoient que le bénéfice d’un avantage fiscal est demandé par voie déclarative n’ont, en principe, pas pour effet d’interdire au contribuable de régulariser sa situation dans le délai de réclamation, sauf si la loi a prévu que l’absence de demande dans le délai de déclaration entraîne la déchéance du droit à cet avantage, ou lorsqu’elle offre au contribuable une option entre différentes modalités d’imposition dont la mise en œuvre impose nécessairement qu’elle soit exercée dans un délai déterminé (voir en ce sens CE, 11 mai 2015, n°372924, SCS Sicli, pour les dégrèvements de taxe professionnelle pour investissements nouveaux ; CE, 22 décembre 2023, n°476379, pour le bénéfice de différents suramortissements exceptionnels ; ou tout récemment CE, 9 octobre 2024, n°490111, pour la demande de remboursement d’une créance de CICE).

Il décline ensuite cette grille d’analyse au cas d’espèce.

Il souligne, à cet égard, qu’il ne résulte pas des termes de l’article 238 du CGI que le formulaire d’option pour le régime « IP box » doit nécessairement être adressé à l’Administration, à peine de déchéance, avant l’expiration du délai imparti au contribuable pour souscrire sa déclaration de résultat, ni que ces dispositions lui offrent une option entre les différentes modalités d’imposition dont la mise en œuvre impose nécessairement qu’elle soit exercée dans un délai déterminé.

Aussi, il juge que la société requérante était bien fondée à solliciter le bénéfice du régime de l’ « IP Box » dans le cadre d’une option matérialisée jusqu’à l’expiration du délai de réclamation, sans qu’il puisse lui être opposé que l’absence d’option à l’appui de sa déclaration de résultat au titre de l’exercice considéré devrait s’analyser comme une décision de gestion lui étant opposable.

On notera que dans ses commentaires au BOFiP, l’Administration ne semble admettre qu’une « rectification » du contenu de la déclaration dans le délai de réclamation – et non une régularisation de l’option dans ce délai (BOI-BIC-BASE-110-20, 3 mars 2023, § 160).

L’arrêt de la CAA sera à suivre avec intérêt si elle est saisie.

  • TA Lyon, 4 février 2025, n°2307194
Photo de Jean-Charles Reny
Jean-Charles Reny

Jean-Charles, Avocat, est associé de la ligne de service « R&D » (GI3) du cabinet. Après avoir géré des problématiques fiscales pour de grands groupes internationaux (M&A, Supply Chain, ou […]