La CAA de Toulouse juge qu’un rescrit accordant à un contribuable une exonération non prévue par la loi, ne saurait être qualifié de décision créatrice de droits, de sorte que l’Administration peut y mettre fin pour l’avenir, sans contrevenir aux dispositions du Code des relations entre le public et l’Administration.
Rappel
Pour mémoire, l’article L. 80 B du LPF étend la garantie du contribuable contre les changements de doctrine administrative (LPF, art. L. 80 A), aux prises de position formelles de l’administration fiscale sur l’appréciation d’une situation de fait au regard d’un texte fiscal.
L’histoire
Un médecin anesthésiste exerçant à titre libéral a sollicité un rescrit (rescrit général de l’article L. 80 B, 1° du LPF), aux fins de s’assurer qu’il était bien éligible au dispositif d’exonération des bénéfices prévu par l’article 44 quindicies du CGI, en faveur des entreprises créées ou reprises dans les zones de revitalisation rurale (nb. ce dispositif a expiré le 30 juin 2024).
L’Administration lui a apporté cette confirmation par un rescrit daté de février 2018.
Mais elle est ensuite revenue sur ce rescrit, par une décision de novembre 2020, en se fondant sur une réponse ministérielle (publiée au JO de l’Assemblée nationale en décembre 2018), excluant du dispositif d’exonération les praticiens statutaires exerçant une activité libérale dans le cadre de certains contrats prévus par le Code de la santé publique.
Elle y précisait que le contribuable ne bénéficierait plus du rescrit délivré en 2018, à compter de l’année 2020.
Le retrait du rescrit a été confirmé par le collège de second examen, en mars 2021. Le contribuable a contesté cette dernière décision dans le cadre d’un REP (en application des principes dégagés par le Conseil d’État dans sa décision Société Export Press du 2 décembre 2016, n°387613).
La décision de la CAA de Toulouse
La Cour rappelle que dispositions de l’article L. 80 B du LPF ne font pas obstacle à ce que l’Administration revienne, pour l’avenir, après avoir estimé que le contribuable ne remplissait pas les conditions lui permettant de prétendre à un avantage fiscal, sur une prise de position formelle concernant l’appréciation d’une situation de fait au regard d’un texte fiscal.
Rappelons qu’en cas changement dans la situation du contribuable ou de la législation après que la réponse a été adressée, celle-ci perd, de fait, toute valeur pour l’avenir sans qu’une notification du service soit nécessaire (BOI-SJ-RES-10-10-20, 4 mars 2020, § 420).
En revanche, si la réponse du service est périmée par un changement de doctrine ou par l’évolution de la jurisprudence, elle continue d’être opposable jusqu’à ce que l’Administration ait publié sa nouvelle doctrine ou fait connaître les conséquences qu’elle entend tirer d’une décision juridictionnelle rendue contrairement à sa doctrine (BOI précité, § 430).
Au cas d’espèce, la CAA de Toulouse souligne que la décision de rescrit de février 2018 devait être regardée comme un avantage fiscal non prévu par la loi, consenti par mesure de tolérance.
Elle en conclut que le contribuable n’avait donc aucun droit acquis au maintien de cette mesure, qui ne pouvait, dès lors, être qualifiée de décision créatrice de droits. Aussi ne pouvait-il pas invoquer les dispositions du Code des relations entre le public et l’Administration, prévoyant qu’une telle décision doit être abrogée dans les 4 mois suivant la prise de décision (CRPA, art. L. 242-1 et L. 242-2).
